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Sona VB
Invité
Dim 15 Mar - 0:09
Sona-Valoran's Battlefront:


Douze silhouettes encapuchonnées autour de moi. Douze personnages immobiles et silencieux qui m’observent. Je suis au cœur du cercle qu’ils ont formé et quelque soit l’endroit où je regarde, je ne peux voir que leur longue robe cérémonielle. La pièce dans laquelle nous sommes est exiguë, à peine éclairée par quelques bougies. Je ne discerne ni porte, ni fenêtre. Chaque coin est identique si bien que même dans un espace aussi petit, je me sens déjà perdue. Qu’est-ce que je fais ici ?!

« Nous vous écoutons. »

Je ne sais pas lequel d’entre-eux vient de parler. A-t-il seulement parlé ? Ou bien s’est-il glissé dans mes pensées ? Je sais qu’ils en sont capable. Peut-être sont-ils déjà tous dans ma tête… Sortez de là ! Mon esprit m’appartient et vous n’y sèmerez pas le doute !

« Sona Buvelle nous vous écoutons. Maintenant, parlez.»

Parler ? Et pour dire quoi ? Je n’ai rien à vous raconter ! Qu’est-ce que vous attendez? Cette rencontre n’a pas le moindre sens. Si vous désirez un entretien, vous n’avez qu’à en faire la demande officielle ! Laissez moi partir ! Et quittez mon crâne !

« Ne tentez pas de nous résister ! Répondez-nous ou affrontez votre châtiment. »

Vous… Vous ne m’entendez pas c’est cela ? Soyez plus attentifs ! Je n’ai pas la moindre idée de la question que vous me posez alors je suis bien incapable d’y répondre. Vous n’avez pas le droit de me punir, encore moins pour une raison inconnue. Expliquez-moi ce qu’il se passe et je vous promets que nous dénouerons cette situation. Ce doit être un malentendu.

« Dépêchez-vous ! »

Rien. Pas un mot ne sort de ma bouche car aucun mot n’est jamais sorti de ma bouche. Condamnée au silence depuis ma naissance, je ne suis pas prête de vous répondre, alors qu’attendez-vous de moi ? N’avez-vous pas pénétré ma psychée ? N’avez-vous pas envahit mes souvenirs et mon esprits ? Vous n’êtes pas là ? Ils ne sont pas là ? Non, ils ne sont pas là… Et s’ils ne sont pas là alors j’ai encore un espace où me réfugier.

Dans mon dos c’était un troisième mage qui m’adressait la parole, d’une voix toute aussi froide que les deux précédents.

« Vous ne retrouverez la liberté qu’après vos aveux. Parlez ! »

Des aveux...  Je veux bien avouer tout ce qu’ils veulent mais je n’ai pas la moindre idée de ce qu’ils attendent. Même s’ils ne sont pas là, je suis certaine qu’ils le savent parfaitement. Quel genre d’objectifs peuvent-ils avoir pour me laisser me torturer l’esprit de la sorte ?

« Vous devez répondre de vos actes. »


Le cercle s’est resserré autour de moi. Je sens le poids de leurs regards qui me mettent à nu au sens métaphorique, ce qui est bien pire encore. Ces gens sont capables de sonder le mental de n’importe qui, d’y instiller des illusions, d’en extraire les souvenirs et d’en deviner les pensées les plus intimes. Perçoivent-ils mes doutes et mes craintes ? Ressentent-ils toute l’ampleur de mon incompréhension ?

Je tente de leur parler une fois de plus mais en vain, les mots s’éteignent avant même de naître au fond de ma gorge et mes lèvres restent closes. Rien ne se passe… Le silence s’installe. Il gonfle, remplit la pièce. Il se fait de plus en plus pesant. Je peux le sentir peser sur mes épaules tandis que les douze Invocateurs me fixent, imperturbables. L’air est si lourd. Je voudrais éclater cette bulle mais j’en suis incapable alors je me contente de l’endurer. Je ne sais pas ce que je préfères : les entendre ou craindre leurs prochaines paroles ?

« Ne nous obligez pas à vous menacer dame Buvelle. Ce sera désagréable pour tout le monde. Il est temps de vous dénoncer. »

Je prends une grande inspiration. J’ai les jambes tremblantes, les yeux mouilles et l’esprit embrumé mais je fais fi de cela. Je suis une championne, je dois me montrer plus forte que cela. Alors je relève la tête. Je les observe sans un mot. Ils ne briseront pas ma volonté. J’avoue avoir refusé ce mariage et avoir blessé les invités, j’avoue avoir volé ces pommes lorsque j’étais à l’orphelinat, j’avoue avoir ignoré cette personne qui quémandait mon aide et j’avoue avoir piégé mon cousin que je déteste tant. J’avoue avoir fréquenté ce jeune Piltovien, j’avoue avoir quitté la nation d’Ionia et me battre à présent pour Démacia qui m’a adoptée. J’avoue avoir protégé cette voleuse et j’avoue avoir abandonné des responsabilités trop lourdes pour moi. Enfin, j’avoue, j’avoue ne pas avoir pu protéger Lestara Buvelle d’une colère que j’étais trop jeune pour maîtriser. Mais vous n’aurez rien de plus que ces aveux.

Si mes pensées bouillonnaient, le monde autour de moi était figé dans le vide. Aucun des mots que j’avais imaginé n’avait pu les atteindre si bien qu’ils mirent leur menace à exécution. Chacun à leur tour, me prenant avec leurs tirs croisés, leurs paroles faisaient feu.

« Nous savions que vous étiez fragile »
« Faible »
« Incapable »
« Perdue »
« Seule »
« Après tout personne n’a jamais voulu de vous. »
« Pas même vos parents »
« Et sa mère adoptive ? »
« Morte par sa main. »
« Sona. Seule. »
« Sona. Solitaire. »
« Sona. Meurtrière. »


Tout se met à tourner. Moi, eux, la pièce. Leurs attaques incessantes me frappent et me malmène, elles s’infiltrent en moi et viennent noircir ce tableau déjà si sombre. Enfermée dans mes propres peurs, je n’aperçois plus que les ténèbres qui m’engloutissent. Ne serait-il pas plus simple de m’abandonner à eux ? Non… Ils ont tort !

Je ne suis pas seule car une étoile brille dans la nuit.

Etwahl brille dans la nuit et avec elle, j’ai retrouvé ma voix. Pour les faire taire, nous n’avons besoin que d’un mot. Alors du bout des doigts, du bout des cordes nous leur clamons :

SILENCE