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Valentina Nikolaïeva
Date d'inscription : 15/10/2017
Messages : 261
Valentina Nikolaïeva
Armurière
Dim 15 Mar - 0:01
Armurière

Passeport
Age :: 22 ans
Patronyme :: Vladimirovna
Surnom :: Valya
Le bout du tunnel

Épreuve 6 : Le bout du tunnel  200313114311366262

Vous voilà seul.
Ces derniers jours, la chance ne vous a pas vraiment souri. Éloigné de toute présence humaine, abandonné dans une station depuis longtemps désertée, vous avez tout le temps de réfléchir. Et vos pensées dérivent vers tout ce qui a un jour compté pour vous.

Votre personnage, croyant sa fin venue, repense à tout ce qu'il avait de plus cher, tout ce qui a le plus marqué sa vie, tout ce qui en faisait le sel. Avec émotion ou philosophie, votre personnage fait défiler sa vie dans sa tête et l'heure du bilan a sonné.




Instructions:
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Artemis-
Invité
Dim 15 Mar - 1:53
Salut !
Moi c'est Artemis da Malfire pour le forum La Sérénissime. Je suis la soeur de Angelo da Malfire. Mais ça, on s'enfiche un peu. Il n'est pas très intéressant c'est juste mon frère, un artiste. Moi, je suis savante et médecin ! L'une des premières femmes médecins. Autrement dit, parfois on me fait confiance, parfois on ne me fait pas confiance. Je ne comprends pas pourquoi le mot scalpel fait peur autant...

J'évolue à Venise depuis peu. J'ai rejoins ces jolies terres pour m'occuper de mon frère, malade de la bouteille. L'assister requiert beaucoup d'attention et maman et papa ont jeté la chiffonnette en le voyant réussir malgré tout l'alcool ingéré...
Ma frimousse ? Juste ici :
Épreuve 6 : Le bout du tunnel  937-37

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Le froid vient effleurer doucement le haut de mes épaules. Je frissonne. Depuis combien de temps suis-je ici ? Une heure ? Un jour ? Une semaine ? Peut-être un mois ? Peut-être un an ?! Je tire sur l'une de mes mèches de cheveux. Si elle est plus longue qu'à l'accoutumée ça fera un an. Si elle est d'une taille similaire à d'habitude, ça ne fera que quelques jours. Mais bon sang, il fait sombre ! Impossible pour moi de déterminer la poussée de mes cheveux alors... Je marche. Pieds nus, je progresse. Je peine à m'orienter et sans réelle motivation, tellement seule dans ce triste monde, je viens m'échouer contre l'un des murs de la station. Je respire une bonne goulée d'air. L'humidité ambiante vient s'engouffrer dans mes poumons. Je tousse. J'éternue. Puis je retousse. Puis j'éternue à nouveau, la moisissure n'aidant pas à apaiser mes poumons douloureux. Qigang, mon ami savant, serait présent qu'il me gratifierait d'un bon coup d’éventail derrière la tête. Il me dirait de mettre mes mains en coupe devant mon museau pour ne pas postillonner sur lui. Quel rabat-joie celui-ci ! Me manque t-il cependant ? Un peu.

Juste un peu.

Parce-que moi, à force de recevoir des coups derrière la tête, j'y ai une bosse d'implantée. On a beau y appuyer dessus pour la faire rentrer, rien n'y fait ! Et j'ai peur de ressembler à Bartolomeo. C'est l'un des Morgloria. C'est même le tonton des Morgloria comme ils aiment le dire. Je l'ai croisé à une soirée et il raconte à tout le monde qu'il a un éclat de boulet dans la tête. Moi, après différentes réflexions, je dirai que c'est lui le boulet. Il est vieux et perd la tête. Est-ce que je vais perdre la tête moi aussi ? Est-ce que je vais vieillir ici sans pouvoir construire une vie de famille ?

A l'idée, je me recroqueville un peu plus contre le mur et j'esquisse un petit sourire en fermant les yeux. J'apprécie une unique chose: le silence. Jamais je n'aurai cru apprécier cette solitude nouvelle. Passé la peur et le caca mou des premiers jours, j'ai compris que je suis seule. J'ai hurlé, supplié pour avoir de l'aide mais je suis seule. Personne me gueule dessus, personne me tape, personne me bouscule, personne m'insulte. Je suis seule. Vraiment seule. Très très seule et pourtant Dieu sait que j'ai baroudé ces derniers jours et que j'apprécie la compagnie des miens? Traînant dans les pattes de Angelo, je n'ai jamais réellement coupé le cordon. Ni avec papa ni avec maman, ni même avec mon corniaud de grand frère. Il faut dire que ce grand dadais est un sacré fêtard. Il m'a fallu veiller encore et encore sur lui. Ne dit-on pas cependant que l’aîné doit veiller sur sa cadette ? J'en doute car cet idiot a clamé, lors d'une soirée fraîche de fin d'hiver, avec toute la fierté qui lui est connue d'avoir une plaque autour du cou. Je ne sais pas quelles sont les normes à Venise mais Seigneur, n'offrons-nous donc pas une médaille aux chiens ? Un bout d'bois, un peu rond, qu'on fait graver de notre adresse pour être certain de toujours retrouver notre bâtard de cleps lorsque celui-ci n'accourt pas lorsque on siffle ? Cet idiot, la langue groggy par l'alcool et le filet de bave aux bords des lèvres m'a récité la phrase que sa médaille aborde. Quelque chose sonnant comme:
"Je suis le Comte Angelo da Malfire, Seigneur de blablabla mon cul. Ramenez-moi si je suis pataud contre une bourse de vingt deniers à la porte du palais."

Le hic? C'est que cet idiot est perpétuellement saoul et perpétuellement en vadrouille ! Il flaire la femelle et hop trace chemin jusque aux bâtisses où elles logent et dansent pour lui. Mais cette soirée riche en émotions a été particulièrement drôle. Les savants étaient tous présents et des godets ont été remplis d'un alcool spécial ! Catullo le savant, Cataldo le rouquin, Gunduz l'homme à turban, Onesimo le banquier, Qigang l'érudit taoïste, Hisham qui dit toujours salem et même une nouvelle ! Une demoiselle blanche comme mes fesses ! Tous y ont goûté ! A l'alcool. Pas mes fesses. Puis oh ! J'en ai revu certains au voyage organisé par Onesimo quelques temps après. On est parti voir sa récente acquisition. Qu'est-ce qu'il était fier le patriarche des Morgloria de nous amener dans son château Morgloriacula. Armée de mon calepin et de tout mon courage, j'ai suivi tout le groupe. J'ai rédigé quelques notes et le problème cette fois-ci n'a pas été mon frère. Oh non ! Cet idiot n'avait pas assez d'alcool pour balbutier quelques mots. Il était conscient et tout du long ! Le problème a été les volailles que nous avons rencontré. Une espèce rare de poulet enragé ! Des poulets de combat ! On s'est fait poursuivre dans tout le domaine et les volailles ont fait leurs besoins tout partout. Le sol était devenu aussi glissant qu'un matin d'hiver et impossible pour moi de me défendre sans me rattraper aux murs. Heureusement d'autres ont été de meilleurs combattants que moi. Moi ? Moi je voulais repartir avec mes notes et un oeuf de ces poulets d'attaque. Dans l'arrière-cour d'une taverne à Venise j'ai déjà vu des coqs de combat. Ils picoraient le sol avec hargne en pensant qu'il s'agissait là de la tête de leur adversaire. Les volatiles gesticulaient sur la droite, puis sur la gauche, en faisant des petits bonds et en piaillant des insultes en coq ! Mais jamais je n'avais vu de poules aussi combatives, aussi braves et déterminées. Du coup, lorsque elles ont commencé à pondre des oeufs j'ai approché tout naturellement mes mimines. Je les ai tendu au possible pour attraper un oeuf mais Angelo m'a interdit d'en prendre un pour en faire autre chose qu'une omelette. Nianiania, les oeufs, nianianiania les maladies... Et j'ai encore pris un coup derrière la tête !

Il ne supporte pas ma réussite ! Il ne supporte pas le fait que j'ai aidé à guérir l'un des plus grands banquiers de ce monde d'une fracture de la troisième jambe. C'est frustrant d'être une femme dans un monde d'hommes. Je suis capable, je sais faire  car je ne suis plus un bébé et pourtant aucun de mes talents n'est reconnu à sa juste valeur !

Ici, je suis seule et il s'agit d'un vilain pied de nez au destin car sans moi, je reste persuadée qu'ils sont rien ! NA ! Qu'entends-je ?! Des pas ?! Je relève le museau et reprends un peu de contenance. Je me redresse partiellement de peur de subir une attaque. N'étais-je donc pas seule jusque alors ? Une silhouette se distingue. Cette silhouette assurée, même sans bésicles, je la reconnaîtrai entre mille. Me relevant, les larmes au bord des yeux je souffle:
"Angelooooooo !"

Et m'apprêtant à serrer mon grand frère dans mes bras, je me reprends un coup derrière la tête. Je fronce les sourcils et l'écoutant pester, j'espère ne pas devenir un de ces jours l'un de ces chevaux à deux bosses que nous avons croisé dans le désert...
Andrei Volkovar
Date d'inscription : 11/01/2018
Messages : 120
Andrei Volkovar
Stalker
Dim 15 Mar - 5:33

Passeport
Age :: 30 ans
Patronyme :: Nikitovitch
Surnom ::
Personnage:

1334 mots

L'imposante Nosalis s’effondra au sol. Il laissa choir sa Makarov souillée et en sale état, rebondissant contre le carrelage dégueulasse de la station.

Je n’ai plus rien, pensait-il.

Son ancien fusil à pompe gisait non loin, brisé en mille morceaux, et sa RPK avait été cassée d’un coup de pattes d’un mutant trop retors. Ce qui restait de sa Dragunov n’était qu’un canon endommagé, une lunette fissurée et le flanc de l’arme labourée par une griffe de créature. Une draisine était en train de brûler, après l’accident. Le tunnel était maintenant bouché. C’était tout ce qui importait. Plusieurs explosifs avaient été nécessaires pour le faire s’effondrer. Ils n’envahiraient plus les stations voisines. Une dizaine de ses compagnons, son escouade en entier, était resté en arrière pour le couvrir pendant qu’il allait remettre en place les explosifs et tout faire sauter. Aucun sacrifice, aucune victoire, se disait-on. Chaque Stalker le savait.

Une draisine était en train de brûler, après l’accident. Quand on comparait le nombre de morts des jeunes personnes dans le Métro, il avait vécu honorablement longtemps. Surtout pour un Stalker. L’on aurait pensé qu’il se débattrait encore en ce moment pour sa vie.

Mais quand on avait le ventre ouvert et une jambe cassée, franchement, qui pensait survivre ?

Seul, les plus fous, les plus braves, et les plus chanceux vivaient parmi les Stalker.

Peut-être n’était-il plus assez fou, plus assez brave, ou plus assez chanceux pour vivre encore un moment.

Jetant son filtre usé, Andrei observa le dernier qu’il possédait. Une heure d’oxygène. C’était tout ce qui lui restait. Une heure pour vivre, sauf si une Nosalis venait l'achever. Il ne pensait pas qu’il en viendrait d’autre. Il en avait tué un paquet. Dix, au dernier compte. Pourquoi comptaient-ils les morts ? Quelle importance ? Il allait mourir. Était-ce pour ne pas penser que cela avait été en vain ? Qu’il ait pu au moins emporter un Mutant pour chaque mort dans son groupe ? Pour sa vengeance ? Parce qu’il pensait avoir encore cette rage de vivre en lui, enfouie sous tous les souvenirs qui renflouaient vers lui

‘Dis, Andrei... Si tu devais mourir, quelle serait tes dernières volontés ?' Avait demandé un confrère Stalker.

‘Je ne sais pas. Je crois que je voudrais simplement faire face au soleil, une dernière fois, avant de mourir.’ Avait-il répondit.

La douleur était lancinante, lui donnant l’impression que chaque mouvement, chaque respiration, chaque tressaillement faisait secouer des lames de rasoirs froids dans son corps. Il perdait du sang. Beaucoup de sang. Sa radio était silencieuse, mais intact, ironiquement. Aucun contact. Avec peine, Andrei se laissa tomber sur le flanc, lui faisant s’exclamer de douleurs. Serrant la mâchoire, il entreprit de ramper en direction des escaliers. Puis il entreprit de monter, avec encore plus de peine, encore plus de douleurs. Chaque marche montée lui arrachait des grondements de douleurs. Mais comme toujours, depuis des années, il recueillait tout en lui, de bon comme de mauvais, en un concentré de quelque chose de fort. Arrivant en hauteur, le Ksatriya dut ramper encore plus loin, au travers des débris et des gravats, formant une sorte de tunnel qui le mènerait vers la sortie.

Il voyait déjà le jour se lever. Laissant une traînée de sang sur son passage, Andrei ne cessait d’avancer.

Peut-être que ce qu’on lui avait dit un jour été vraie.

‘Celui qui aura assez de patience et de courage pour scruter dans les ténèbres sera le premier à apercevoir la lumière’

Et il était ironique qu’en cet instant, la lumière en question ne se manifestait qu’avant qu’il ne soit emporté dans les ténèbres.

Comme une braise qui éclatait une dernière fois avant de se refroidir.

Sortir du trou avait été difficile. Se traîner vers la sortie de la station l’avait été encore plus, alors qu’il dut se mettre debout en prenant appui sur sa jambe non blessée, en usant d’une barre de fer comme bâton. Respirer devenait difficile, sa salive épaissie par le sang et la bile bloquait le filtre de son masque. Sortant du tombeau, Andrei observa la Moscou de la surface, séparée par le fleuve. C’était une belle vue en panoramique. Andrei s’allongea contre un amas de débris et de bétons. Son lit de mort, pensait-il. Avec mollesse, Andrei retira son masque à gaz.

Il respirait l’air vicié, s’en gorgeait comme d’un assoiffé au milieu d’un désert écrasant. Le ciel était d’un gris clair se rapprochant presque du blanc. L’hiver était donc arrivé, rendant le tout presque plus immaculé, étonnamment. Ses yeux bleus étaient fixés sur le paysage. Sa respiration devenait sifflante, crachotant du sang. Il aurait dû avoir froid. Pourtant, il avait l’impression qu’une main chaude s’était posée sur son épaule.

-Tu sais... J’ai essayé. J’ai énormément essayé. C’est... C’est ça qui est important, non ?

Andrei toussota un caillou de sang, faible. Son corps tremblait.

-J’ai... J’ai pu parler à Anya. Je lui ai tout dit. Toi. Moi. Natalya. Je lui ai tout dit. Comment tu avais été magnifique. Comment notre fille avait été si belle. Elle avait tes cheveux. Elle avait mes yeux.

Le vent se levait, comme si le monde semblait prêter une oreille attentive au Stalker. À l’homme aux portes de la mort.

-Je te demande pardon... À toi... À toi... À Anya... Je n’ai pas su vivre. Je n’ai pas su vivre comme tu aurais voulu que je le fasse. Mais... Je pense que je peux au moins laisser les autres vivres. Je ne vais plus leur faire de mal. Je n’ai jamais voulu leur faire du mal. Je... Je voulais juste que tout cesse.



Il crut sentir la main de Svetlanna sur sa joue. Il avait un air plus serein. Plus calme. Il tremblait de moins en moins. Son esprit devenait étrangement plus clair. Plus éveillé.


-Mais je pense que tu le sais déjà, n’est-ce pas... ? Je crois... Je crois que tout ce qui importe, c’est de savoir ce que l’on doit faire avec ce qu’on a entre les mains. De notre temps. De notre amour. De nos capacités. Mais surtout de notre amour.



Sa respiration ralentissait. Le ciel devenait plus clair. La couche de nuage s’amincissait, laissant des rayons de soleil passer sur la Moscou désolée, comme au travers des voiles d’un rideau blanc s’agitant sous un vent doux et frais.



Une dernière image de la splendeur d’un monde qu’il aurait souhaité partager avec sa femme et sa petite fille, comme d’une étoile avant qu’elle n’explose, emportant le reste dans la noirceur.



‘Andrei ! Andrei, on arrive ! Surtout, ne bouge pas d’où tu es ! Andrei, répond-nous ! On arrive, Anya est avec nous et Alex amène du renfort ! On a survécu, attends-nous !’



-Si seulement c’était possible... Ne serait-ce que pour m’excuser, j’aimerais revenir. Réapprendre à vivre. Je crois... que ce serait... bien...



Le soleil laissa éclater son éclat sur le Stalker. Ses yeux s’étaient fermés. Son souffle avait quitté son corps. Sa poitrine s’abaissa finalement, un air paisible sur son visage, comme d’un dormeur pris dans un sommeil profond, rêvant d’un Eden qu’il avait cru perdre, maintenant récupérés, brillant sous le même soleil qui l’avait accompagné dans son passage.



-Je le vois, il est là-bas ! Hurlait alors Alex, engoncé dans une tenue anti-radiation, accompagnée de plusieurs hommes.



-Andrei ! Andrei, me voilà ! On est arrivés, je...



Anya monta les derniers escaliers, apercevant le corps immobile, le visage tourné vers le soleil éclatant. Le reste du groupe arrivait alors, haletant, mais devinrent bientôt silencieux eux aussi.



Le vent semblait hurler sa plainte.



-Andrei ?
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Fiora L.
Invité
Dim 15 Mar - 11:30
Personnage Fiora Laurent:

1499 MOTS.

Le noir.
Une odeur acre et sulfureuse qui vous forçait à devoir expulser rapidement et par accoue les premières bouffée d'air après un réveil difficile. Ce qui n'avait rien avoir avec les douces brises des campagnes demaciennes, durant lesquelles, la Duelliste effectuait de longues balades, chevauchant les nobles destriers.

Aucun souvenir récent.

La tête de la Maîtresse de Maison lui tiraillait, tel le métal coincé entre l'enclume et le marteau d'un habile forgeron de sa famille, le même qui avait tant fasciné son regard durant sa jeunesse et qui continuait encore à la fasciner. Ses yeux peu habitués à tant d'obscurité avaient mis un certain temps avant de remarquer l'étrangeté des lieux parfaitement inconnus à sa mémoire. Avait-elle atterri dans les bas-fond de cette vile, dans ce nid de vipère et rival de la noble cité de Piltover : Zaun ? La Maîtresse de maison n'avait que peu de temps pour voyager et cette cité humble et fourmillant cité de créateur attisait en elle la flamme de passions vieilles et éteintes par la culture demacienne.

Personnes.
La Duelliste parcourra les lieux, marchant encore et encore, perdant la notion du temps. Sa rapière d'acier bleu, cette lame, à même de trancher chaire et os, tangible ou non, choquait ses hanches, la rassurant pendant sa recherche et lui servant de nouvelle unité de mesure temporel dans se lieu dépourvu de la moindre trace, de la moindre signe de vie récente. Dont seul les rats et la vermine insectoïde lui exprimaient leurs vivacités. Au moins ces derniers avaient un point commun avec Noxus, même dans la crasse, l'obscurité et le déshonneur, ils arrivaient à proliférer.

La fatigue.
Dame Laurent, contrainte par la faim et l'épuisement de son périple dut se reposer, elle devait monter un camps de fortune et la caresse du froid allait bientôt venir lui mordre le visage. De plus, il était hors de question de dormir à même le sol, tel une vulgaire paysanne, La chef de Famille appartenait tout de même à la Grande Noblesse Demacienne. Fiora se mit à fouiller les recoins d'une large zone, dont une étrange machine longue et percée de trou aussi large qu'une fenêtre, tel un gigantesque serpent de métal droit et enflé, visiblement vétuste et hors service.

Dans sa quête, un compagnon de fortune se montra à La Championne.
A deux, ils créèrent un aménagement simple, réussissant même à allumer un faible feu, dont la majorité des combustibles étaient étrange voir hautement improbable aux yeux de la Combattante, mais temps qu'ils faisaient leurs offices en alimentant se maigre feu, elle s'en contre fichait. Son nouveau foyer ressemblait à l'un de ses nombreux camps de chasseur, la cabane de chasse en bois en moins.

La chasse. A se mot certaines pensées lui déclenchèrent un léger sourire.

"Savez-vous que dans notre contré, il s'agit d'un art, réservé à l'élite ? Son interlocuteur l'observait de ses yeux noirs. Oh vous pouvez me juger, il est vrai que peu de noble se retrouve à jouer les paysans. Un temps mort dans la discussion se fit. Cela me rappel que nous nous sommes point encore présenté, Fiora, de la Noble et Grande Maison Laurent, Duelliste de renoms et l'une de Championne d'Arène représentant la Belle et Noble cité de Demacia, enchanté de faire votre connaissance."

Fiora regardait son compagnon d'infortune qui préférait garder le silence malgré sa piètre tentative de passer le temps en discutant, ce qui ne la découragea en rien, continuant son monologue.

"Vous savez, même si cette place ne s'y prête point, cela me rappel mon enfance. Se temps bénie où mère tentait en vain de faire de ma personne, une épouse digne et de mon frère Admmar me donnant des cours d'escrime, dans cette douce et chaleureuse roseraie à l’insu de père..."

Un long silence se fit, les yeux de la demacienne se brouillèrent. D'un geste aussi fluide que gracieux, elle essuya les perles salées, roulant sur ses joues rosies et émaciés par les jours de marche.

"Père...Un homme si courageux, si fière, sa présence manque à notre famille. Le regard non dénué de pitié de son compagnon lui fit hausser un sourcil. Ne soyez pas désolé, car je suis la seule à blâmer...Vous devez le savoir...J'ai assassiné mon père."

Une autre pause se fit. Fiora soupira, se levant, sans même porter attention à son interlocuteur, tirant dans un mouvement aussi rapide que fluide sa rapière au clair, menaçant de la pointe de sa lame le visage blafard du pauvre homme.

"Vous pouvez continuer à vous perdre dans vos préjuger. La noble déporta sa lame vers le haut, coupant visuellement son visage en deux parties. Son regard fut dur et froid, rappelant les rudes hivers. Ou, vous pouvez me laissez continuer."

Le silence fut son unique réponse.

"Bien, comme vous l'avez pu remarquer, je suis une femme et nous sommes, en temps normal, destiner à devenir des épouses, des mères et des pions entre les mains des nobles masculins. Une pointe de haine se fit sentir. Hors, j'ai refusé d'être manipulé, d'être un point, de servir les intérêts autres que les miens, ce qui a condamner mon père à une mort certaine. Nous avons deux grandes coutumes part chez nous : Le Duel et l'Honneur..."

La Duelliste s’offusqua en voyant le sourire partiellement édenté et moqueur de son compagnon d'infortune.

"Isolent ! Que vous en soyez dépourvu m'importe peu. La Championne sourit tristement. Vous avez deviné la suite n'est ce pas ? Tuer son géniteur afin de restaurer l'honneur dans le sang part un Duel. Quel belle mascarade. Ils n'étaient point venu voir notre famille réintégrer la noblesse, seulement étancher leurs soifs de sang."

Le bruit d'une lame fouettant l'air se fit entendre, résonant dans les tunnels adjacents à l’immense pièce.

"Je vois que malgré votre silence, mon histoire vous intéresse. Bien, alors sachez que depuis se temps maudit, je me suis juré de ne plus laisser le déshonneur s'abattre sur ma Famille. J'ai osé l'improbable, réussi là où les autres ont échoués, transpercé du file de ma lame ceux qui s'opposent à ma volonté et portant des calomnies ou autres infamies sur mon Nom. Sans jamais céder à la facilité et aux bassesses indigne de mon rand et de mon sang."

Fiora resserra sa prise sur le manche de sa rapière.

"Encore et encore, jours après jours, aucun de ses idiots ne retiennent la leçon de leurs paires. Je me suis fait une sombre réputation de ses meurtres légalisés. Je suis lasse et révulsée par leurs infâmes comportement, à un point où je refuse l'idée même de devoir être mère un jour. La demacienne fixait son compagnon. Car cela signifie la légation de mes titres et des terres à mon mari. Je n'ai pas fait tout ses sacrifices pour laisser un homme prétentieux et vaniteux guider ma vie !"

La Championne se mit à rire, un rire à la hauteur de son regard.

"Mais maintenant, me voilà coincé ici, dans un lieu que je ne connais point, perdue dans un monde si étrange, si désolé, si...Suis-je morte dans l'un des innombrables Duel ? Suis-je condamner à errer sans bute ? A espérer de trouver un moyen de sortir d'ici et de retourner au près des miens ? Est-ce là ma punition pour avoir bravé le Destin que nos Dieux tracent ? Comment puis-je continuer à protéger l'Honneur des Laurent dans cet état ? Evidemment, tu n'as pas de réponse à me fournir."

Un long soupire tinté de fatigue et de lassitude vint ponctuer sa phrase avant que le silence vint faire son grand retour.

Ce silence, si pesant et si fragile à la fois, brisait par le moindre bruit que faisait la Duelliste.

"Je trouverais une solution à notre problème, je le jure sur mon Honneur et celui des Laurent. Je te ferais voir et t'émerveiller sur mon pays et ses trésors. Je ne peux pas me résoudre à abandonner maintenant, ni jamais. Les miens comptes sur moi. Mais chaque chose en son temps. Je vous laisse prendre le premier tour de garde, qui sait quel créature peut venir nous traquer en ses lieux dépourvu d'humanité ? Je garde mon arme, elle ne vous aidera pas et il est préférable que je sois prête aux combat dès le réveil. Par la Justice, vous devriez trouver un moyens d'endiguer votre problème de vermine, cela est immonde !"

Annonça Fiora en retirant du crâne humain, lisse et blanchi par le temps, un mille-pattes qui tentait de se frayer un chemin depuis l'orbite creuse de son compagnon de fortune avant de prendre place dans la couchette fait de bric-à-brac, sans prendre garde aux lueurs caractéristiques d'une Invocation forcé.
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TessaKHS
Invité
Dim 15 Mar - 12:03
Info personnage:



Pourquoi je suis seule ici, dans ce tunnel froid et dévasté ? Je marche depuis des heures, j’ai perdu le fil du temps. Je viens au bout de mes forces et le silence ambiant est assourdissant, digne de mes pires cauchemars. Encore quelques pas et mes jambes lâchent, je m’affale par terre et je n’ai plus la force de me lever. Je finis de me laisser aller par terre et pose la tête à même le sol. Peut-être que si je ferme les yeux, ça sera fini?

De longues minutes passent, toujours dans le silence le plus complet jusqu’à ce que je les entende.

Ahaha! Vous l’avez vu là? Je ne comprends pas pourquoi elle a droit un traitement faveur de la part des profs ! Comment ça se fait qu’ils laissent une fille aussi débile dans notre école?

Je les entends les moqueries qu’on m’a lancé pendant plusieurs années jusqu’à mes dix ans. Je pose mes mains sur mes oreilles pour ne plus les entendre mais ça continue. Les voix des enfants laissent place à la voix froide de ma grand-mère.

Si tu n’es pas capable de dire ce que tu veux manger, c’est que tu n’as pas faim. Va dans ta chambre, tu descendras quand tu pourras parler.

C’est peut-être un peu trop sévère…” dit mon grand-père.

Comment voulez-vous qu’elle apprenne sinon?” reprends sa femme.

Comment avait-elle pu me faire ça ? Moi qui a toujours eu des soucis de poids, j’avais beau manger, je ne grossissais pas mais j’avais de grosses baisses de tension quand je manquais de sucre, ce jour-là, je suis restée allongée toute la journée dans mon lit jusqu’à ce qu’on toque à ma porte et qu’une employée de la maison m’apporte un plateau repas fait sous les ordres de mon grand-père. Combien de temps elle m’aurait laisser comme ça l’autre? Je ne préfère même pas l’imaginer. Après cet épisode, je n’ai plus passé de “vacances” chez eux.

Hey Tessa et si on faisait un marché? Vu que tu veux absolument lire Alice au pays des merveilles, si on le lisait ensemble? Tu lis bien à voix haute en classe, je le sais bien alors pourquoi pas avec moi hein ? Promis on ira à ton rythme !

La voix enfantine de Jamie me réchauffe un peu le coeur dans cet océan de ténèbres. C’est le jour où on a vraiment commencé à se fréquenter et qu’il est devenu un de mes seuls amis. C’est grâce à lui que j’ai surmonté mon blocage de langage.

Je t’aime Tessa et même si je suis dans un autre pays, je penserais toujours à toi, comment je pourrais oublier ma petite soeur adorée hein? Je t’enverrais des lettres promis, alors ne pleure pas.

William… c’est ce qu’il m’a dit le jour où il est parti pour l’Ecosse pour faire ses études. Je me rappelle lui avoir demandé de ne pas y aller et de ne pas me laisser seule comme Clayton l’avait fait avant lui. Mes grands-frères me manquent tellement…

Ta mère a trouvé un travail au Japon, on va y déménager et tu viens avec nous.

Papa, maman, pourquoi vous ne m’avez pas laissé le choix? Pourquoi je ne rien dis et plaider ma cause pour rester ? Quelle aurait été ma vie si on était resté en Angleterre? Ma propre voix résonne cette fois-ci:

"Attends s'il-te-plait... tu veux bien me dire ton nom?"

Keitô

Je crois que le début de mes aventures à Kobe n’a réellement commencé qu’à partir de ce moment. Le moment où j’ai rencontré mon meilleur ami, Keitô.

Euh.. oui, je viens d’arriver, mais comme je ne suis pas venue moi-même lors de l’inscription, je ne sais pas trop où aller… Tu pourrais m’indiquer le chemin ?

Meyuki, le jour où tu es entrée aussi dans ma vie, j’ai commencé à changer. Moi qui n’avait jamais eu de vrai amie, qui n’était pas à l’aise avec les rapprochements physique, tu as tout bouleverser, un nouveau souffle dans ma vie, avec ta bonne humeur, ta gentillesse sans faille et ton addiction aux câlins. Tu me manques tellement et tous les autres aussi. Mes amis. Pourquoi vous n’êtes pas là avec moi?

Écoute, j'y ai réfléchis et je suis prêt à attendre. Je ne suis pas stupide au point de penser qu'une soirée peut te faire changer d'avis. Alors, je te propose que la prochaine fois que tu reviens à Londres, on se voit et qu'on en rediscute."

De nouveau la voix de Jamie revient pour mieux me torturer. Pourquoi j’ai couché avec lui alors que je ne ressentais rien ? Pourquoi je me suis laissé emportée par ses sentiments pour moi et j’ai accepté qu’on sorte ensemble ? Le résultat n’était qu’une longue année de relation à distance et pour quoi?

Désolé mais c’est un au revoir Tessa.

Il m’a trahi et abandonnée alors que j’ai tout fait pour lui.

Bonsoir miss Yorke, je suis Neil Marshall… Disons que ma famille veut me voir en couple, et que la tienne a l’air de vouloir voir la même chose à ton sujet, alors on pourrait passer un marché.

Qu’est-ce qu’il m’est passé par la tête quand j’ai dit oui? A la base, je l’avais fait pour protéger Jamie de ma famille mais si je suis honnête, je ne l’ai jamais vraiment regretter parce que ça m’a permis de connaître Neil et pas uniquement le rôle qu’il joue sans arrêt. Je peux bien l’avouer maintenant, lui et moi, on est pareil, c’est pour ça qu’il peut me pousser dans mes retranchements et m’atteindre comme personne. Même si il me rendait folle, j’ai aimé nos moments ensemble et j’aurais aimé que ça continue encore et encore parce que je me sentais vivante avec lui. Je n’ai jamais eu l’occasion de lui dire et je ne pense pas que j’en aurais la possibilité un jour.

Il y a tellement de choses que j’aimerais faire. Voir mon neveu grandir, trouver enfin ma voie et planifier mon avenir avec plus de certitudes. Je veux découvrir l’art à travers le monde, découvrir d’autres cultures, voir des paysages inédits pour les dessiner. Et peindre, je veux peindre pour exprimer toutes mes émotions à travers la toile et les partager avec les autres pour les faire ressentir les mêmes choses que moi. A quoi sert l’Art sinon ? Toutes ces couleurs me manquent dans ces tunnels sombres. Je veux entendre de la musique de nouveau. La musique qui a le don de me transporter et que je ressens au plus profond de mon coeur et de mes tripes parfois.

Que j’aimerais entendre les voix des gens que j’aime une toute dernière fois…

[1100 mots]
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Ophé Iry
Invité
Dim 15 Mar - 15:21
Irydaë:

Ophélia:

Du gel sur les montagnes, un vent soufflant dans la vallée, des rails élevées sur un pont et un vide hurlant qui montait jusqu’au ciel. Il murmurait dans mes oreilles, me glissait des mots incompréhensibles dont je saisissais pourtant la profondeur. Le gel des montagnes, le vent soufflant dans la vallée, les rails élevées sur le pont et le vide hurlant qui montait jusqu’à moi, tous me rappelaient là d’où j’étais partie. Le néant criait mon nom, silencieusement, je l’écoutais psalmodier une mélodie dont je connaissais l’air ; celle de la mort. Et ce gel sur les montagnes, ce vent qui soufflait dans la vallée, ces rails élevées sur ce pont, ce vide hurlant « Ophélia » me faisaient me sentir chez moi. Au bord de ce quais de gare abandonnée, je regardais le fond du précipice, mes pieds appuyés sur le rien en-dessous.  

Car tout a commencé là où tout s’est arrêté, dans ce camp militaire où d’une balle au cœur ma première vie me fut volée, alors que je n’étais qu’une vendeuse de poupées … une vendeuse de poupées qui cachait de nombreux secrets. Je me souviens de la douleur, de ma peur, de mon impuissance, et des cris effarés des soldats pour qui je n’étais rien d’autre qu’un travail bâclé. Ma mort avait été sale, je dois être la seule personne en vie à connaître l’apparence de ses poumons. Mon sang flottait dans cette cuve, et la dernière vision dont j’ai souvenir est celui d’un ciel orageux qui disparaissait derrière une bâche que l’on recouvrait au-dessus de mon cercueil liquide.

Ce fut comme un rêve dont on ne garde aucun souvenir, mes yeux se rouvrirent immédiatement après que j’en eu perdu l’usage. Il faisait noir, j’étais enfermée dans une alcôve et mon réveil avait été si difficile que j’en avais oublié comment marcher. Faible, j’avais lentement déchiré les parois de mon cocon de magilithe, me retrouvant seule et nue au milieu d’une ruelle où tombait la pluie. Quelques pas à peine hors de ma cage et je me retrouvai dans une autre, internée dans un asile nommé « Hoffnungslaus ».

Les docteurs là-bas ne me virent pas comme une patiente, de par les cristaux dans mon dos, j’étais devenue prétexte à d’infâmes expériences pour me forcer à retrouver la mémoire. Ils n’ont réussi qu’à me faire retrouver mon pire côté, qu’à me redonner mon esprit de marionnettiste psychotique. Mes poupées, je les avais oubliées, elles qui me confortaient dans ma solitude, elles qui, de par la chair dont elles étaient faites, étaient devenues mes enfants. Aujourd’hui seulement, je mesure le chagrin qui m’avait poussé à la folie. Aujourd’hui, je mesure à quel point la mort de mon père a tout changé.

Une secousse retentit dans la gare …


De la mort, j’avais gardé un doux souvenir, une attirance qui me tirait encore et encore à y retourner. Je porte encore cette sensation, comme si mon voyage de l’autre côté m’entraînerait irrémédiablement entre les bras de mon père. Mes médecins, ils ne me laissaient pas la liberté de choisir, ils ne me laissaient pas la liberté de découvrir le monde extérieur. Ma mémoire, je l’avais oubliée dans le néant, mon monde pendant près d’un mois se résumait aux barreaux de ma cellule. J’ai égorgé mon infirmière, puis j’ai trouvé le responsable de mes soins et je lui ai lentement ouvert la cage thoracique avant de m’enfuir. Ce n’était qu’un début, il y avait tant d’autres personnes qui devaient payer pour mon emprisonnement.

Je me suis exilée vers le sud, où j’ai trouvé une bienfaitrice, quelqu’un que j’admirais de tout mon cœur. En fait, à y réfléchir, je l’ai aimée comme une mère que je n’ai jamais eue. Pendant trois semaines, j’ai vécu sur un nuage, à découvrir une vie normale, une vie différente. J’interrompis moi-même cette fantaisie, m’exilant aux trois coins du monde pour survivre. J’appris, lors de mes voyages, le sens véritable du mot survie, de la chasse, mais je n’avais pas encore appris ce que c’était d’être une proie.

Une seconde secousse, plus proche, se fit entendre, suivie d’un craquement. La peur instinctive revint serrer ma poitrine, et je sentis une larme couler sur ma joue.

Eventuellement, je suis retournée chez moi, auprès de ma bienfaitrice, après un long voyage, m’attendant à retrouver ma chambre, mon foyer et tout simplement la lumière qui brillait sur mon lit, au travers de ma fenêtre. Ce jour fut la première fois où je fis la connaissance de mon bourreau, de mon Régisseur, mon chasseur. Celui à qui les dieux, maudits soient-ils, avaient confié la tâche de me faire disparaître, car j’étais, et je reste, une erreur dans leur plan infaillible. Il me força à m’exiler, une fois encore, pour retourner à My’tra, là d’où je venais. Pensant retrouver un paradis, je me suis égarée dans un enfer.

J’étais seule là-bas, je n’avais rien à manger, mes vêtements étaient déchirés, je marchais pieds nus sur le sol, on me méprisait. J’aurais dû mourir là-bas, mais des gens emplis de pitié pour moi m’ont sauvée … Flavien, Svenya, Swenn, ces noms que j’emporterai avec moi lorsque sera rendu le dernier jugement. Ils m’ont permis de survivre plus longtemps, de montrer à ces dieux que leur nature, j’y étais plus qu’adaptée. Ils m’ont fait ressentir que même une abomination comme moi avait le droit d’être aimée.

Mon exil, je le poursuivis au travers des neiges, jusqu’aux terres des dragons. Je me souviens encore de cette fanatique qui m’avait forcée à traverser la toundra sans bottes. Je me souviens plus encore de l’aspect moribond de mes pieds lorsqu’enfin je pus me reposer. Je me souviens de la douleur comme je me souviens de cette pensée : je suis … et bien malheureusement, encore en vie. Après quelques mois, je pus retourner à Daenastre, continent qui m’a vu naître et renaître. Je ne suis jamais retournée auprès de ma bienfaitrice, une personne comme ça ne méritait pas que je la lie à mon destin.

Et pourtant, le destin m’imposa de retrouver encore une fois quelqu’un qui m’était chère, une jeune fille my’tranne, Ruby. Je l’avais rencontrée lors de ma première vie, je l’avais hébergée, nourrie, j’étais tombée folle d’elle, m’imaginant que si j’avais une fille, c’était comme ça que je voulais qu’elle soit. Elle m’a aidé à rendre justice sur les médecins qui m’avaient torturée …

Secousse

Et là, maintenant …

Secousse

Elle me manquait terriblement.



Une violente explosion retentit derrière moi, tandis que je sentis les débris de la grande porte s’échouer sur mon dos. La peur n’avait jamais été aussi violente, elle faisait battre mon cœur comme si elle comptait m’abattre en le faisant exploser. Derrière moi, les pas résonnaient, et, tremblante, je me relevais doucement de mon perchoir, mais je ne me tournais pas. Je l’entendis s’arrêter, puis, lentement m’approcher.

Alors, voilà. C’était là où tout devait se terminer, sans doute, c’était mon histoire. Elle ne sera pas entendue, mais moi, moi je m’en souviendrai. Je ne veux pas disparaître, non, l’appel du vide est trop fort pour que je puisse l’ignorer. Ma destination était claire : en bas, là où le vent hurle.

Il s’approche.

Mon père m’attend là-haut, quel genre de fille serais-je si je ne lui revenais pas ?

Ses pas sont à quelques mètres derrière moi.

… n’est-ce pas ce qui avait toujours dû être ?

Il s’arrête. J’entends sa respiration.


- Ton tourment s’achève, anomalie.


Ha … haha. Il n’a pas tort. Je suis morte de peur, là, maintenant, mais c’est un certain réconfort que de se dire que tout va s’achever. Cette peine, cette souffrance, ce tourment, comme il dit. Tout ça va me manquer … tout ça va me manquer … tout ça …  pourquoi je rigole ?

Je n’ai jamais été aussi heureuse que maintenant. Au bord de ma mort, j’ai l’impression étrange, que finalement, j’ai aimé ma seconde vie. Je n’ai qu’un pas à faire pour tout terminer et pourtant, mon pied refuse d’avancer. Je veux me laisser mourir, mais tout ce que je ressens, tout ce que je n’ai jamais exprimé ... dois-je vraiment tout abandonner ? Fermant les yeux, je revis un visage ... son visage.

Hors de question.

Des pierres tombèrent de mon dos, roulant entre les jambes de mon Régisseur. Me retournant, j’abaissais un couteau sur son front. Il m’arrêta, prenant ma gorge entre sa main solide comme une pince. Avec un large sourire, sentant ma peur devenir adrénaline, je me défragmentais pour réapparaître derrière lui, à la place d’une de mes pierres. Mettant toute mon âme dans mon pouvoir, je fonçai sur lui, accélérée par l’air que je maîtrisais.

Il tituba à l’impact, dégringolant tandis que je l’emportais avec moi dans le vide.

Dans ma chute, je vis le gel des montagnes, j’entendis le vent dans la vallée, j’aperçus les rails sur le pont et j’écoutais le vide qui montait, avec un sourire.

… tout ça me manquerait. Et toi aussi, Ruby.
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Anoushka
Invité
Dim 15 Mar - 18:38
Spoiler:


« Data ? »

J’observe un instant le petit robot qui vole autour de moi. Je ne comprends pas pourquoi il vole encore. Je ne sais pas pourquoi il est encore en marche. Alors que tout le reste est  immobile. Même les armures se sont éteintes.  Je ne comprends vraiment pas. Enfin.

« Quels sont les dégâts ? »

Je sais bien qu’ils sont assez importants. Déjà je ne sens plus mes jambes. Déjà je sens le froid m’envahir.  Je n’arrive même pas à lever le bras pour le poser sur mon ventre. Mais j’ai besoin de savoir. Je sais que personne ne viendra me chercher. Je le sais… Je le sens. Mais est-ce que j’en ai vraiment envie ?   Ma vue se brouille… Est-ce que parce que j’ai perdu mes lunettes ? Non  … Mais le peu que je vois est assez parlant. Je n’en ai plus pour longtemps.

« Data enregistre. »

J’essaie de prendre une grande gorgée d’air. Ho dieu que cela fait mal.… Cette zone me rappelle un peu la Sibérie. Avec des arbres dénudés de feuille et la neige qui recouvre tout.

« Exploration de la Zone 9 déconseillée sans préparation. » Je serre doucement les dents avant de reprendre. J’ai l’impression que ma voix diminue peu à peu… « Phénomène inconnu qui désactive nano machine et Écaille. Équipe d'exploration aucun survivant »

Ha les écailles, un petit bijou de technologie. Un bijou de technologie qui ne nous avait jamais fait défaut jusqu’à présent… Qui nous avait permis de combattre contre les créatures peuplant la planète. Qui nous avait permis de survivre. Je ne sais pas pourquoi l’écaille de mon amie s’est soudainement désactivée. Comme si toute son énergie s’était vidée.

«Data retourne à la colonie. Message pour le commandant Dupuy»


Avec une grimace je me laisse retomber contre l’arbre… Pendant une seconde je suis du regard le petit robot.   Je l’ai toujours gardé pour une seule raison. Parce que Sha me l’avait offert.  Je sens doucement les larmes monter le long de mes paupières alors que la tristesse m’envahit peu à peu. Je n’ai pas pu te sauver cette fois Sha…

Je n’ai pas pu recoller les morceaux.   J’ai encore ton sang sur les mains…  

J’ai mal Sha…

Je t’aime…

Pourquoi je ne te l’ai pas dit plus tôt ? Je dois te rejoindre… Je dois bouger. Ramper.

Je t’aime tellement et depuis toujours…

Ho notre première rencontre je m’en souviens parfaitement. Tu es arrivée comme un taureau, comme si tu allais renverser toutes les tables. Tu t’es plantée devant moi. Une vraie montagne de muscles. À cette époque tu avais les cheveux blonds comme les blés. Mais déjà couper extrêmement court.   Pendant une seconde j’ai cru que tu venais taquiner le nouveau médecin de l’équipe j’étais encore si jeune.

Mais tu m’as simplement souri … Je me rappelle surtout la phrase que tu as dite… Que si quelqu’un m’ennuyait ou ne faisait pas ce que je disais … Et bien tu l’assommerais.  Ça m’a fait sourire. Mais je ne pensais pas que tu le ferais vraiment. Est-ce que toi aussi tu avais un faible pour moi à cette époque ?  Est-ce que ton cœur battait à chaque fois que tu me voyais sortir de la salle de bain ?  Est-ce que ton cœur avait envie d’exploser quand tu me voyais avec quelqu’un d’autre ?

Dis Sha… Toi aussi tu as rêvé de notre vie sur terre ? Avant de partir… Est-ce que parce que j’étais là que tu as souri avant de rendre ton dernier souffle ? J’aimais notre unité. C’était comme une petite famille. Je n’avais plus connu cela depuis la mort de ma mère adoptive… JE t’aimais tellement, je vous aimais tellement… Même si je n’ai plus la force de lever le bras pour sortir la photo. J’ai encore leurs visages au fond de mon esprit…

Combien de fois est-ce que nous nous sommes saoulés  lors d’une permission ? Tu sais Sha… Tu étais drôlement lourde à transporter quand tu étais complètement bourrée.  Mais tu étais tellement adorable. Oui je t’ai toujours trouvée magnifique, attirante… Mais pourquoi est-ce que je ne te l’ai jamais dit ?

Tu as été mon pilier Sha. Je sais que tu aurais voulu que je lutte. Mais a quoi bon puisque tu n’es plus la. J’ai failli te perdre sur terre… Et je te perds maintenant alors que nous sommes sur une nouvelle planète ? Une nouvelle terre. Je me rappelle encore ta joie quand tu as été choisie par l’écaille.  

Je me souviens parfaitement de ton  cri de plaisir quand  tu as pu l’enfiler. Cela te donnait un nouveau but. Et te voir heureuse me rendait tellement heureuse. Tu paraissais tellement plus vivante que sur terre. Là où tu avais perdu un bras.  Je peux simplement me laisser porter par les souvenirs. C’est plus facile que de laisser la douleur envahir mon corps.

Tu te rappelles notre appartement Sha. Un magnifique appartement, nous l’avons décoré à deux.  Je ne sais pas pourquoi, mais j’ai eu l’impression que c’était pour nous un pas en avant. Et pourtant aucune de nous deux n’a osé avouer ce que l’on ressentait vraiment. Il y avait encore une fois trop à faire. Pourquoi on ne trouvait jamais le temps de se poser et de se parler ?

Je me souviens de ma surprise quand tu as été me montrer l’agneau du Giga bélier. Tu m’avais parlé de ces créatures géantes, tu me les avais montrés en photo. Mais il semblerait qu’ici comme sur terre, les soldats ne savent pas toujours obéir aux ordres. D’ailleurs tu te souviens du Capitaine Luis. Je trouve qu’il te ressemble un peu… Il a la même musculature hors du connu et la même tendance à faire des conneries. À agir selon son envie. Enfin il suffit de voir la bestiole qu’il a ramenée. Il faut avoue que l’agneau était adorable… Sauf qu’il a grandi tellement vite cet animal. Une vraie montagne de muscle. Mais dont la laine est extrêmement agréable. En fait il me rappelle toi et Luis… Grand. Fonceur et un peu con…

Un petit rire m’échappe avant que ne m’échappe un gémissement. Bordel  ça fait mal…  Encore un pas… Encore un mouvement…  La neige est froide autour de moi… Mais j’ai l’habitude. Au moins je mourais dans un paysage enneiger… Un peu comme si j’étais de retours chez moi.

La faune de cette planète va nous tuer…   Je ne sais pas ce qui nous a attaqués. Mais les dégâts qu’il a faits sur un corps humain sont impressionnants. Encore une fois tu as  essayé de me protéger avant même de te protéger toi. Alors que tu étais encore plus diminué que moi  sans ton écaille.

Dans mon esprit ton corps  te jetant entre moi et la créature reste  gravé. Je  t’avais pourtant bien dit de ne plus jamais faire cela… De ne plus jamais te sacrifier pour moi…

Un dernier dernier effort… Il n’y a que le blanc autour de moi. Et je ne vois que les cheveux Rose de Sha… Je veux y arriver…

Est-ce que tu vas m’accompagner  Sha…

Ma main se temps. Je n’ai pas beaucoup avancé, mais mes doigts effleurent les tiens. Ta main autre fois si chaude est tellement froide. Tu parais tellement fragile.  Mais au moins je peux te tenir… Je ne partirais pas seul.  Tu vas venir me chercher n’est-ce pas ? J'ai peur et en même temps. Vivre sans toi c'est impossible...

« Je t’aime… Sha. »

Des mots qui se perdent dans l’air… Dans le silence de forets aux pieds de la montagne… Le corps du médecin restera à cet endroit peu  être pendant longtemps. Plus loin le corps du reste de l’équipe.   Les traces d’un combat sanglant contre la faune locale… Un combat dont les traces seront doucement recouverte par la neige qui se mets a tomber silencieusement du ciel. Comme pour recouvrir les corps des deux russes…



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Nyriel
Invité
Dim 15 Mar - 19:57
Spoiler:


Du bronze.

Il avait fallu que ce soit du bronze.

Qui utilisait encore des armes en bronze aujourd’hui ? Sérieusement ? Deux jours après avoir été grièvement blessé, réfugié dans les sous-terrains du métro, l’elfe se demandait encore comment il pouvait avoir joué de tant de malchance. Sans parler de l'entrée de sa cachette qui s'était écroulée quelques minutes après qu'il se soit relevé, manquant de l'engloutir sous les gravats ! Il était coincé là, dans cette station de métro désaffectée. Il faisait sombre, si sombre. L’humidité était partout. Çà et là, on entendait les gouttes suinter et son ouïe sur-développée commençait à composer mentalement la symphonie de ces tunnels.

Sans doute en ré mineur.

Des violons en pizzicati pour les souris, les rats. Le son délicat de leurs petites pattes dans le noir, de leurs cris. La harpe pour l’humidité ambiante, relayée par une guitare. Les vents pour rappeler le froid désagréable, le manque de lumière. Son souffle pénible alors qu’il tentait en vain de trouver une sortie peinant avec son poumon était perforé. Les cuivres, éclatants, violents, dissonants sans doute des autres instruments pour chaque pic de douleur. Le violoncelle pour son désespoir, la contrebasse et les timbales en fond pour sa volonté de fer à avancer, encore, encore, encore : même s’il savait que c’était vain.

Car il s’était obligé à avancer malgré tout. Il fallait sortir, trouver une échappatoire ! Difficilement, il avait mis un pied devant l’autre mais son entraînement d’éclaireur riait de son obstination : il tournait en rond, il en avait parfaitement conscience et de ce fait s'épuisait inutilement. Il allait mourir dans ce tunnel de métro désert, il en était certain. Son souffle sifflant s’échappait de ses lèvres exsangues, finissant péniblement dans un râle alors qu’il glissait le long de la paroi carrelée, froide, dure, impitoyable dans son dos, laissant une trace sanglante sur le blanc sale des carreaux. Il était fatigué. Épuisé physiquement mais moralement… moralement, il ne savait pas. Il n’était pas certain.

Mourir…

Il avait si souvent, si longtemps appelé l’oubli éternel !

Il n’avait pendant très longtemps pu imaginer la mort que comme une douce et terrible embrassade. La peur de l’inconnu. Le soulagement de la fin. Il l'avait appelée, année après année, siècle après siècle, n'ayant jamais vraiment le courage de mettre un terme à ses souffrances. Et puis celles-ci s'étaient estompées, lentement. Il avait réappris à sourire, à ressentir de la joie, à trouver un peu de paix. Il avait tant lutté pour retrouver la force vivre ! Malgré la présence à ses côtés de son fils, de son frère, il avait tant souffert de la mort de son époux et âme-sœur ! Et là, alors qu’après quarante-trois siècles, il parvenait enfin à trouver un équilibre, qu’il commençait depuis quelques siècles à vraiment oublié sa solitude et l’impossible, l’insoutenable vide dans son cœur, il errait dans les sous-terrains du métro, luttant pour survivre avec une flèche à tête de bronze qui avait perforé son poumon. C’était risible. C’était tellement ironique. Un rire désabusé s’échappa de sa gorge. Un rire à moitié fou qui se répercuta  sur les parois carrelées, grave, triste et perturbé, que l’écho multipliait, le rendant malsain.

Le son le fit frissonner. Dans l’odieux silence et la cacophonie discrète du métro désert, le froid n’était pas suffisant pour le mettre mal à l’aise. Mais le musicien avec son oreille absolue, n’était que trop sensible à ce qui pouvait parvenir à ce sens exacerbé chez lui du fait de ses aptitudes naturelles.

Nyriel ferma les yeux.

Il voulait le vent. Les vallées et les monts de son enfance, de sa première vie d’adulte. La vallée de Xandoor où il avait été si heureux. Il revoyait encore le soleil baigner le lac de la caldeira de ses mille couleurs. Le lac dans lequel il avait passé son premier bain avec son époux, selon la tradition de son peuple, pour bénir leur union et leur porter chance. On ne pouvait pas dire que cela avait vraiment bien fonctionné, quoique dans le temps qui leur fut imparti, ils avaient été follement heureux.

« La première fois que j’ai trouvé la force de me donner à toi, » murmura-t-il au vide, à l’absence, la scène revenant avec précision à sa mémoire. « T’en souvient-il, Llunaan ? J’avais si peur après tout ce que tu m’avais fait subir pendant ma captivité... Je t'avais fait mien mais le contraire, après les viols, les abus... Pourtant, j'en avais besoin et j'avais tant hâte aussi ! Et tu avais si froid ! »

Il inspira profondément, un sourire aux lèvres, oubliant la douleur impossible qui vrillait son côté. Ce n’était que les odeurs de métal, d’humidité sur la pierre, sur le béton, mais son imagination transforma tout cela, il sentit à la place l’odeur de la neige et de l’eau légèrement soufrée, l’odeur suave et délicate de la peau de son bien-aimé, de l’air pur et frais de l’altitude.

« Je regrette tellement, tu sais… je regrette tellement de ne pas avoir eu foi en toi. De ne pas avoir voulu trouver le courage de bouger, de convaincre avec toi les anciens pour que nous partions. Si seulement je n’avais pas été si égoïste, Llunaan, tu serais resté à mes côtés ! Nous aurions élevé notre fils, nous l’aurions rendu heureux ! Nous en aurions élevé d'autres, même. »

Ce n’était pas ce qui s’était passé, son cœur se serra alors que les conséquences de cette simple décision apparaissait avec une violente clarté et sa voix se brisa dans un sanglot étouffé. S’il avait encore été le seul à payer le prix de la mort de Llunaan ! Mais non ! Atharyel, leur fils, né de Llunaan, n’avait jamais pu connaître son père génétique. De plus, lui n’avait jamais su l’aimer comme il aurait dû le faire, trop occupé à se débattre avec son propre maelström d’émotions. Un soupir. Sa main libre massa l'arrête de son nez avec lassitude. Atharyel. Pourrait-il jamais lui dire à quel point il était désolé de ne pas avoir su être un père digne, un père fort et capable de lui donner tout ce qu’il avait toujours souhaité ?

« Trop de regrets. Trop d’erreurs. »

Un froid constat. Qui avait dit que le temps rendait sage ?

« Je n’ai jamais été sage, » se répondit-il à lui-même.

Il voulait trop de choses, trop d’émotions, trop intenses pour que la sagesse puisse entrer en compte dans sa vie. Et après sept mille ans, sept mille longues années, alors qu’il s’était juré de se prévenir de toute relation trop intime, de se garder de sombrer dans les abysses de l’amour, de la passion… il avait posé les yeux sur lui… et avait plongé dans le délicieux enfer des tourments émotionnels. Pour Yukito, il n’avait aucun regret. Pas le moindre. Il l'aimait. Il l'aimait infiniment et jamais il ne demanderait pardon pour cela. Alors qu’il se disait mourant, qu’il regardait si calmement en lui, il sourit. C’était comme si dans les ténèbres le soleil s’était invité pour caresser doucement sa peau pâle. Il était si bon d’aimer.

Et si je dois mourir, ainsi soit-il. J’ai vécu assez longtemps, je suis attendu au loin depuis des millénaires, songea l’elfe avec un calme et une plénitude qu’il n’avait jamais ressenties. Il avait eu de la chance de pouvoir retrouver la joie de bras doux et aimants pour entourer sa taille.

Ses doigts étaient gourds, il avait étrangement froid, lui qui n’était pas frileux. Nyriel chassa la sensation, rappelant de toutes ses forces les sensations, les émotions que les deux hommes de sa vie avaient fait naître en lui, qu’il avait toujours soigneusement, furieusement fait grandir, évoluer. Parce qu’à quoi bon vivre, si ce n’était pour sublimer l’amour et la passion en autre chose de plus grand encore ?

L'elfe n’entendait plus rien, les rares sources de lumière n’éclairaient plus les yeux aux intenses iris turquoise. Mais sur son visage, alors que toute sa vie défilait devant ses yeux que Thanatos rendait aveugles, il ne restait qu’une expression détendue, souriante, heureuse. Tant de malheurs, tant de douleur dans sa vie … et encore plus de bonheur. Toute sa musique jouait dans sa tête. La flûte qu’il avait ramenée de chez lui sur Terre, la sonate pour quatre mains au piano qu’il avait composée pour Yukito et lui, la symphonie que ses nombreuses aventures et émotions avaient inspiré raisonnaient harmonieusement dans son âme qui s’échappait, divaguait.

« Llunaan, Yuki... » son murmure n’était plus qu’un râle. « Je vous retrouverai. »

Apaisé, il ferma les yeux. Plus de froid. Plus de peines. Plus de joie. Plus d’angoisses. Plus de…

Rien.

Un souffle, un voile.

Un cri au loin, des larmes et l’espoir d’un secours.

Le silence. Assourdissant. Tendre. Bienveillant.

La Paix.

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Amy [Te]
Invité
Dim 15 Mar - 20:17
Informations contexte & perso:


Plic. Douleur lancinante à la tempe. Ploc. Forte odeur d'humidité. Plic. Obscurité la plus totale. Ploc. Où était-elle ? Ploc...

Amy se redressa en geignant de douleur. Ses doigts caressèrent sa tête délicatement, puis s'éloignèrent, poisseux, pour descendre devant son nez. L'odeur de rouille la fit grimacer. Du sang. Elle avait dû se cogner en tombant. La dernière chose dont elle se souvenait était d'avoir marché, longtemps, à tâtons, le long de la paroi rocheuse, humide et glissante. Le cristal de téléportation ne l'avait pas amené au point prévu et la demoiselle avait erré un long moment en espérant regagner la surface rapidement et trouver du réseau pour appeler quelqu'un... Elle n'avait pas osé ouvrir son smartphone une seule fois, craignant de gaspiller le plus précieux pourcentage de batterie. À la réflexion, cela faisant sans doute bien plus longtemps que ça. Cela ne pouvait pas faire qu'une journée que la blonde était là ! Sans lumière, impossible de se repérer, et les maigres étincelles qu'elle parvenait à créer de temps à autre ne suffisait qu'à lui permettre de se repérer quand elle arrivait à un croisement.

Elle se souvint aussi qu'elle s'était endormie plusieurs fois, que son estomac criait famine depuis sa dernière pomme, et que l'eau qui ruisselait le long de la roche avait un goût très amer, mais suffisait à l'hydrater. Cependant, sans nourriture, la jeune femme ne tiendrait plus très longtemps. Elle le sentait. Tendant l'oreille, elle essaya de repérer le plus infime bruissement de roche ou sifflement d'air, mais il n'y avait rien d'autre que le silence. Le silence et l'obscurité, toujours. À croire qu'elle avait atterri dans les abysses sans fonds du centre de la terre.  

Se prenant les pieds dans un amas de roche dépassant, la blonde s'étala de tout son long et roula sur quelques mètres d'un pan incliné. La douleur la poussa à se mettre en position fœtale et une première larme s'échappa, ouvrant la porte à d'autres, si nombreuses. Elle ne voulait pas mourir ici ! Elle avait tant à faire à Terrae ! Tant à vivre ! Elle ne devait pas abandonner ! Pas maintenant ! Il fallait tenir bon...

Ses doigts se plantèrent dans la mousse et la terre humide, des fragments de roche se plantèrent sous ses ongles, lui arrachant un cri de surprise et de douleur. Tirant sur ses muscles douloureux, elle se traîna ainsi un moment dans la poussière qui l'asphyxiait et se mit à tousser. Elle n'avait pas fait tout ce chemin personnel pour mourir seule aussi loin de sa nouvelle vie. Tant d'effort réduit à néant... C'était intolérable ! L’amertume se mêla à la colère, au désespoir...

Des visages familiers se dressèrent dans son esprit. Ceux qui l'avaient aidé à rouvrir la librairie, les ateliers artistiques avec les enfants, leurs petites mains dessinant un monde d’innocence haut en couleur, ses amis, le concert, la guitariste aux yeux océaniques... Elle fut secouée de sanglots qui résonnèrent dans les galeries avant d'être happés par le silence. Allait-elle aussi disparaître, là, dans les profondeurs labyrinthiques, sans aucune chance d'être retrouvée ? Peut-être que ce n'était que justice finalement. Après avoir poussé Gabriel du haut des escaliers... Après avoir volé sa vie aussi simplement, et malgré tous ses remords, il était juste qu'elle paie. Sans doute était ce là sa punition pour avoir été heureuse alors que lui n'avait plus la moindre chance d'y parvenir. Non. Non !

Poussant sur ses jambes de toutes ses forces, ignorant son équilibre précaire et le mélange de fatigue et de souffrance qui la rendait fiévreuse, Amy reprit son cheminement, petit pas par petit pas. Il y avait des personnes qui l'attendaient ! Qui comptaient sur elle ! Elle n'avait pas le droit de regretter son geste. Elle avait débarrassé la terre d'un monstre ! Qu'avait-il d'humain après tout, si ce n'était son apparence ?!

- C'est ce que tu penses, mon ange ?

Amy frissonna d'effroi et chercha partout, autour d'elle, sans rien voir d'autre que le néant qui aspirait les restes de sa vitalité.

- Tu crois que tu méritais plus que moi de vivre ?

Ses poings se fermèrent. Ce devait être la fièvre, l'inanition, rien de plus que son cerveau épuisé qui s’emballait. Il était mort. La mort est définitive.

- Tu m'as manqué mon ange...

Un souffle effleura son oreille en délivrant la voix telle qu'elle était dans ses souvenirs, doucereuse, venimeuse, envoûtante. La blonde fit un bond, se retournant, battant le vide de ses bras. Il n'y avait personne, elle ne devait pas utiliser ses dernières forces pour se battre contre un fantôme... Puis elle pensa avec reddition que c'était peut-être l'ultime chance de s'expliquer et chuchota, brisée, en se souvenant de ce que la dragonhomme lui avait révélé :

- Je sais que tu m'as aimé, chaque jour, chaque minute que nous avons passé ensemble. Mais...

Ses poings se serrèrent douloureusement contre ses flancs et elle tomba à genoux en énonçant à voix haute, terrifiée et soulagée en même temps, des perles cristallines traçant des sillons sur sa peau poussiéreuse :

- Ton amour aurait fini par me tuer ! Par nous tuer, tous les deux ! C'était toi ou moi... Tu le savais, Gabriel. Tu l'as su dès l'instant ou tu m'as vu. Tu aurais fini par me tuer...

Seul le silence lui répondit et soudain elle eut l'impression qu'une poigne implacable se saisissait de son avant-bras. La voix hurla, assourdissante :

- Tu es à moi !

Cette fois, Amy resta de marbre face à l'illusion. Plus calme qu'elle ne l'aurait cru, la demoiselle soupira tristement et souffla, presque avec tendresse :

- Je n'ai jamais été à toi, Gabriel. Je me suis échappée de ta cage de menaces le jour ou tu es mort, et regardes la personne que je suis devenue... Je n'avais pas le droit de te tuer, je ne le voulais pas. Mais je ne regrette pas. Je peux enfin faire ce que j'ai toujours aimé, sans personne pour m'en blâmer. J'ai ouvert ma librairie, et elle marche ! Je me suis fait de vrais amis, pas ceux qui traînaient avec moi pour s'attirer tes faveurs. Je joue à nouveau du piano, et j'apprends même la guitare ! J'aime tant jouer, j'ai même fait un concert avec des filles géniales, et nous nous sommes trouvés un nom, les Voidkiller ! J'aurais tellement voulu partager cet amour de la musique avec toi ! Et puis... Je crois que je suis amoureuse... Et j'ai même appris qu'un jour, j'aurais un enfant... Ma vie ne s'est pas arrêtée quand tu es parti...

Amy eu un rire fébrile, et penser à la brune lui donna un regain d'énergie. Elle acheva alors, souriant avec audace :

- Je vais continuer à vivre, Gabriel, et je vais être heureuse. Ce sera ma façon de rendre hommage à ta mémoire et à la vie que je t'ai volé. Si j'abandonnais l'idée d'y parvenir, alors je ne vaudrais pas mieux que toi, j'espère que tu le comprends. Je ne gâcherais pas la chance que tu m'as offerte en mourant ce jour-là. Je me fiche de savoir si c'est un coup du destin, du karma, ou d'un quelconque dieu, je ne saurais jamais assez l'en remercier ! C'est le plus beau cadeau qui m'a été fait à ce jour !

La blonde avait fini sa tirade en hurlant, pleine de conviction, et elle fut envahie d'une sérénité nouvelle. Enfin... Elle s'était enfin débarrassée de son fardeau, de l'ancre qui l'empêchait de s'épanouir pleinement. Elle reprit sa marche, plus déterminée que jamais. Elle voulait la revoir, lui dire à quel point elle avait gagné de l'importance dans sa vie, que ce sentiment... Ce n'était pas que de l'amitié. La jeune femme voulait aussi jouer à nouveau au bar avec ses amies, boire un cocktail en rigolant des derniers potins. Aider Alice à créer de nouveaux ateliers pour les enfants, faire la murder party qui célébrerait l'ouverture officielle de la librairie quand l'éclipse serait passée.

- Tu ne sortiras jamais d'ici mon ange ! Tu vas rester avec moi pour toujours !

Amy ignora le fantôme et continua d'avancer malgré ses demandes répétées, son ton colérique, puis suppliant. Une lumière vive apparu au détour d'un embranchement, l'aveuglant, et elle se protégea les yeux de la main. Une voix féminine, rongée par l'inquiétude, l'interpella et en la reconnaissant, la demoiselle ne put s'empêcher de sourire d'avantage. Pandora. Elle était sauvée. Son cœur se mit à battre si fort qu'elle crue qu'il allait exploser, et c'en fut trop pour son corps et son esprit éprouvé par son long cheminement dans le ventre de la terre. Au bruit de pas qui suivait la lampe torche, la demoiselle devina que sa sauveuse n'était pas seule. Ils pourraient la remonter sans peine. Elle était si fatiguée... Et si heureuse...

- Game over, Gabriel, souffla t'elle avec fierté avant de perdre conscience.
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Alice DT
Invité
Dim 15 Mar - 21:15
Alice Green Ft. Interforum (Ep. n°6)





Le bout du tunnel



Présentation:


Des jours entiers ont passé depuis que tu t’es retrouvée coincée dans ce trou. En vérité, tu ignores combien de temps exactement s’est écoulé depuis la dernière fois que tu as vu la lumière du jour. Tu avais commencé à graver des bâtonnets sur un vieux bout de mois à l’aide du poignard caché dans ta botte, mais tu as fini par abandonner l’idée. Ce qui était censé te rassurer empirait largement la situation. Savoir que les semaines passaient avec une lenteur épouvantable et que tu n’avais toujours pas trouver de solution pour te sortir de ce piège te rendait folle. Alors tu as renoncé à compter les heures, tu as cassé ta montre pour qu’elle arrête de t’angoisser, tu as caché ton calendrier de fortune improvisé et tu t’es contenté de vivre chaque seconde comme la dernière. Seulement voilà, elles se sont succédées, par milliers, et aucune ne t’a apportée le salut que tu recherchais vainement. Te ramenant sans cesse à ton point de départ : tu es emprisonnée sous terre sans pouvoir en sortir.

Et peu à peu, toi, la détermination incarnée, tu commences à perdre pied et à envisager le pire. Assise dans la poussière, tu joues avec le manche de ton couteau pour faire tournoyer la lame autour de tes doigts, les jambes étendues dans un jean en lambeaux, le froid de la pierre contre laquelle tu es appuyée mordant la peau de ton dos couvert d’un vêtement difforme et troué. Alors que tes yeux se fixent sur la tranche de l’arme où ton reflet se confond comme dans un miroir flou, dévoilé par la lumière agitée du feu de camp qui crépite à tes côtés, ton esprit vacille un instant. Est-ce que ce serait la fin d’Alice Green ?


Je n’y crois pas que je vais mourir comme ça. Comme un putain de lapin bloqué dans son terrier et qui crève d’asphyxie avec son plafond écroulé sur la gueule, enterré vivant. Ah, elle est glorieuse ma fin de vie ! Bordel, ça va s’arrêter maintenant. Les humains me riraient au nez. Après tout, à leurs yeux, je suis vieille. Quatre-vingt-seize ans la mamie ! Et bien conservée en plus. Mais j’ai à peine vécu un siècle que je vais déjà mourir sans avoir rien accompli de mon existence.

Qu’est-ce que j’ai fait de tout ce temps si précieux et pourtant si dérisoire dans le quotidien d’un ange ? Qui a besoin de s’inquiéter quand il a l’éternité à vivre dans un monde parfait appelé le Paradis ? J’ai gaspillé des années à mentir à tout le monde. Plus ça va et plus je regrette. J’ai fait semblant, j’ai fait bonne figure, j’ai joué la comédie. Pour mes parents, pour les rassurer, pour qu’il me foute la paix. Pour ma survie, parmi les anges, parmi mes ennemis. Pour me préparer, être prête, être déterminée. J’ai fait croire à qui voulait bien l’entendre que j’étais plus docile que dans mon enfance. J’ai réfréné mes pulsions, j’ai tu mes émotions, j’ai tout gardé au fond de moi en priant tous les jours pour que ça ne me pète pas soudainement à la tronche. Ou à celle d'un pauvre type qui sera tombé sur la mauvaise personne, au mauvais endroit, au mauvais moment. J’ai fait des sourires à mes semblables que je trouvais si différents et méprisables, j’ai fait des courbettes à une reine qui me donnait la nausée, j’ai servi une armée qui défendait un pays que je voulais quitter. Tout ça pour quoi ?

Oui, je me suis retournée contre les miens. J’ai trouvé la force, le moment venu, de partir. De cracher dans cette main qu’on tendait vers moi pour me retenir. J’ai été voir Haelyn, je lui ai dit merde, j’ai blessé ses précieux esclaves de la garde royale. J’ai fait un gros fuck au Paradis en courant dans les rues de Damned Town, blessée mais fière de ce que j’avais accompli. Pourtant, est-ce que j’ai réellement avancé ? Je ne suis toujours pas déchue. Il va falloir encore patienter plusieurs mois pour que mon aura* reflète enfin ce que je suis. Alors en paria certes, je suis recherchée des miens, apatride et traître, mais qui au fond acceptera de fermer les yeux sur cette putain de lumière qui me colle à la peau comme la pire des sangsues ? Les autres se disent que ce sont les ténèbres qui rongent mon cœur mais c’est faux. C’est cette pureté envahissante qui érode mon âme. La noirceur, je me baigne dedans depuis longtemps. Pourtant, cette merde d’auréole reste impossible à briser.

Peut-être que Dragon aurait réussi, lui. En me jetant à bras ouverts dans son antre, est-ce que je ne m’offrais pas en sacrifice au diable ? Si j’ai espéré encore du roi des démons qu’il me protège, je lui ai aussi laissé le loisir de faire de moi une créature des enfers. Il serait sûrement parvenu à m’arracher mes ailes. Mais pour ça, il faudrait que je sois à la surface. Jamais je n’aurais l’occasion de faire mes preuves. De lui montrer ma valeur. Car je sais que j’aurais pu lui apporter beaucoup. J’étais capable de retourner la ville entière pour le convaincre de m’accepter dans ses rangs. Je voulais tellement qu’il me reconnaisse pour ce que j’étais. L’une des leurs. Comme un atout dans son jeu. Une farouche guerrière qui aurait triomphé à ses côtés sur les anges et leur pétasse de reine. On aurait plongé, lui et moi, dans la haine et la colère, déchaînant les flammes sur notre passage pour que personne n’oublie jamais qui nous étions. Qui nous sommes. Mais ça n’arrivera jamais. Son excellence est en liberté et je compte sur lui pour botter le cul d’Haelyn comme il se doit. Même si ça se fera malheureusement sans moi. Dire que je ne verrais jamais les enfers, un rêve de plus qui s’envole, les terres arides infernales me resteront inaccessibles pour toujours.

C’est évident puisque je vais mourir ici. Sans que personne ne parte à ma recherche. Sans personne pour s’alarmer. Sans personne pour me pleurer. Ou alors, il y a quelqu’un. Mais est-ce que c’est bien raisonnable d’y songer ? C’est drôle putain, pourquoi c’est encore lui qui vient hanter mon esprit dans un moment pareil ? Puis il arrive en dernier, comme une fleur, il se pose là et il me nargue. Penser à lui est aussi épuisant que de l’avoir en face de moi. Est-ce qu’Alec sera triste ? Je ne sais pas. « Bon débarras ». La réaction la plus plausible. Je lui ai brisé le cœur, je ne peux pas m’attendre à des fleurs et des chocolats ? Putain, je tuerais pour du chocolat. Parfois, je me dis que je n’aurais pas dû jouer les rebelles mais rester sage, vivre d’amour et d’eau fraîche comme dans un conte de fées. J’aurais dit à Alec : « Viens, on se casse. » On aurait fui Damned Town pour s’installer sur Terre, parmi les humains. On aurait eu deux enfants, une maison et un chien. Et un monospace pour faire partir tout ce beau monde en vacances. J’aurais passé le reste de ma vie à entretenir un jardin, laver les caleçons sales de mon démon de mari et aidé nos gosses à faire leurs devoirs. Une vie paisible et simple, dont tant d’humains rêvent, loin des conflits divins, loin de cette ville maudite, loin du merdier.

Beurk. Plutôt crever. Je suis Alice Green, bordel ! Je me bats pour ma liberté. Si on me met à terre, je me relève. Si la vie m’envoie des claques, je réplique. Si l’univers s’acharne sur moi, je lui dis d’aller se faire foutre. Alors nique ce trou à rat, je ne vais pas abandonner si facilement. Je n’ai pas fait tout ce chemin pour que ça s’arrête maintenant.

Tu te mets debout rageusement en plantant ton couteau dans la terre. Tu relèves tes manches, renifles un bon coup en remettant ta tignasse noire en place. Il est temps de trouver la sortie.

Explications:

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Djerin
Invité
Dim 15 Mar - 21:46
Je vous présente Siegfried Levir, tout droit débarqué de NRP. C'est un mutant d'un univers alternatif de X-men. Sa mutation lui donne le contrôle de la position et la nature (mais pas la quantité) des molécules qu'il touche dans un large rayon, sous forme liquide ou solide. Il est très puissant, mais son pouvoir possède une contrepartie problématique. Il est constamment conscient des molécules qui l'entourent dans ce même rayon (et même plus quand il est attentif). C'est très lourd pour son esprit et il est constamment victime de migraines. Pour combattre ça, il utilise tout les moyens possibles pour inhiber ses sens. Il est à la tête d'une organisation qui lutte de façon violente contre toutes les formes de racismes (anti humain ou anti mutant) et évacue les jeunes mutants des zones où ils sont en danger (pour eux-même ou bien les autres). C'est un beau gosse séducteur qui accumule les conquêtes de courte durée, passe la moitié de sa vie ivre-mort et qui à plus de sang sur les mains que la plupart des gens à qui il fait des reproches.




Son souffle s'allongeait à chaque respiration. Sa poitrine se soulevant doucement, le liquide pourpre sur sa poitrine s'écoulant un peu plus au sol sous son regard perplexe. Était-ce la fin ? Difficile d'y croire. Il se rappelait avoir mené la charge face à des hordes de mutants ou des tueurs déchaînés ou sauté en hélicoptère vers des immeubles en flamme pour en sauver les victimes. Il avait fracassé à mains nues le crane d'une entité improbable qui menaçait ses compagnons alors que sa jambe gauche pendait inerte le long de sa sœur. Il avait mis plusieurs mois à se remettre de cette blessure d'ailleurs. Il émit un borborygme liquide ressemblant à un rire en se rappelant la tête de sa sœur adoptive lorsqu'il avait été ramené pâle comme la mort à leur campement. Et l'engueulade qui avait suivit alors qu'elle le recousait à moitié dans les vapes. Une époque à laquelle il n'aurait jamais cru participer lorsqu'il habitait à New York. Le sort avait voulu qu'il soit en train de gérer un problème de mutants (du genre humain à pouvoir. A l'époque le sens était différent) avec son équipe sur Moscou le jour où les missiles étaient tombés.

Au début tout s'était bien passé. Installés dans une station isolée, il avait pu la maintenir à flot avec sa mutation et le soutien martial de ses compagnons. Mais très vite les choses s'étaient dégradées lorsque le contrecoup fatiguant de son pouvoir avait commencé à se faire sentir, lorsque les gens étaient devenus de plus en plus demandeurs et qu'ils avaient tentés d'agresser son équipe sous prétexte qu'ils étaient des ''sales mutants américains qui les traitaient comme des esclaves'' (alors qu'il n'étaient que trois mutants sur dix dans le groupe). Un soulèvement contre eux les avait forcé à riposter dans un mouvement de fuite paniqué. Un de ses compagnons, un mutant pyroclastique, s'était retrouvé isolé dans la foule et dans un mouvement de survie avait relâché ses capacités sans limite, incendiant l'intégralité de la station et de ses habitants. Depuis le tunnel, Siegfried et les membres de son groupe avaient dû exécuter la mort dans l'âme les rares survivants pour que l'histoire ne se propage jamais. Après cet événement, il se promirent de ne jamais parler à qui que ce soit de leur nature et de le plus jamais se servir de leurs mutations.

Les années passant, leur petit groupe connu des pertes et des recrutements. Se rapprochant de Polis ils rejoignirent l'Ordre de Sparte comme une évidence, protégeant le Metro contre toutes les menaces qui pouvaient leur faire face. Chaque combat amenant sont lot de frères morts ou de civils souffrants à cause de leurs inaptitude à faire face à toutes les menaces. Repensant avec amertume à toutes les larmes versées sur leur sillage, aux stations malades passées au lance-flammes, aux survivants comptant leurs morts ou aux inondations meurtrières. Des dix fiers combattants qu'ils étaient en arrivant à Moscou, seuls restaient trois vétérans épuisés de cet incessant combat pour la survie, accompagnés de Rangers moscovites ignorants tout de leurs origines.

Dans cette station isolée, loin de toute ligne de communication, coupés du reste du Metro par un éboulement qui avait emporté la moitié du groupe et blessé la plupart des autre membres, Siegfried sentait la fin de l'histoire approcher. L'amertume de sa situation lui remontant la gorge avec un goût acide lui rappelant celui bien connu du vomi, il se crispa pour ne pas se vider un peu plus sur le sol. Son dos douloureux s'élança face à cette crispation et il retint un juron. Se sentant partir, il eut une dernière pensée pour ce pauvre gamin dont il avait brisé la nuque dans la station où ils s'étaient réfugiés au début. Si cette pensée l'avait hanté toutes les années où il avait survécu, il était toujours persuadé que les choses à cet endroit auraient pu se dérouler autrement. Ses yeux se fermèrent doucement alors que l'air vicié du tunnel quittait ses poumons....

La chute d'eau glacé sur son visage le réveilla instantanément, provoquant un sursaut chez lui et sa main se dirigeant d'instinct vers son arme. Sa sœur le regardait d'un air méprisant, sa gourde vide dans la main. L'eau avait chassé le vin qu'il avait renversé sur sa tenue de Stalker et partiellement débarrassé son esprit de la brume éthylique dans laquelle il avait tenté de noyer la mort d'encore plus de compagnons.

Debout espèce d'ivrogne. On a peut-être trouvé une voie praticable vers la surface mais on a besoin que tu la dégage. Tant pis pour le secret. C'est ça ou se laisser crever ici comme tu as essayé de faire. Et il est hors de question qu'on meure dans ce tunnel de merde.

Avec un grognement, celui qu'on appelait le Maudit à l'époque de New York se redressa pour s'ébrouer et chasser le sommeil qui le guettait. Il vérifia que la poussière du tunnel n'avait pas encrassé son chargeur et fit un pas. Le suivant le mit à genoux alors qu'il vomissait tripes et boyaux sur le sol. Et la majorité des deux litres de vinasse dont il avait fait le contenu de sa gourde. L'estomac vide et toujours un peu chancelant il reprit la marche vers l'escalier qu'on lui avait indiqué. Avec la sobriété arrivant à une vitesse galopante à l'aide de l'adrénaline, sa perception du monde si particulière revenait.... Et avec elle la douleur. Il grimaça vers ses compagnons de route un genre de sourire en rallumant sa lampe torche et en enfilant son masque à gaz.

Quitte à mourir, autant le faire loin de ces tunnels mortifères je suppose... Un peu d'air frais, ça vous dit ? Alors en route !
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ChrisUTM
Invité
Dim 15 Mar - 22:43
Spoiler:

Au moins ici il n’entendait pas de mugissement, pas de gargouillements. Il y avait à la place un silence pesant et inhabituel. L’obscurité qui régnait dans la station n’était pas en reste elle non plus. Épaisse à au point de donner l’impression qu’elle s’immisce dans les voies respiratoires, et dans les moindres pores de la peau. La douleur dans son bras gauche était sourde, et l’humidité qu’il sentait dans sa manche jusqu’à son gant ne présageait rien de bon. Sa main droite balayait et le sol, à la recherche du quai, et d’une surface plate. Juste assez confortable pour s’asseoir en tailleur en enlevant son sac à dos tout en posant sa kalachnikov à plat sur le sol, la crosse longeant sa cuisse pour ne pas la perdre dans le noir. Il tira une lampe torche du sac à l’aveuglette, être pointilleux sur l’organisation de son barda avait comme quoi du bon. Une pression sur le commutateur, et un rai lumineux fendit l’ombre devant lui pour détailler l’endroit dans l’étroit cercle éclairé. Rien, si ce n’est l’habituelle couche de poussière épaisse et solidifiée des stations abandonnées. Pas de suie, pas de graisse. Vide depuis des lustres.
Chris posa la lampe sur le cul d’un vieux bocal de samogon vidé quelques heures à peine plus tôt, l’ampoule pointée vers le bas. Le faisceau se répercutait faiblement sur le sol et les parois de verre, mais lui offrait un halo visible suffisant pour qu’il puisse rapidement inspecter son bras. Plusieurs lacérations profondes l’avaient engourdi de douleur. Juste assez de bandages pour toutes les couvrir.

Putain, c’était jamais facile de se lancer dans une mission d’éradication. Pourtant le contingent était solide. De bons gars, nombreux. Des armes propres et fonctionnelles, presque autant que celles de l’ordre. Et des cartouches à n’en plus finir. Et ça avait même bien commencé.
On ne savait pas trop de quelle espèce appartenaient ces bêtes-là, mais une seule chose comptait. Elles approchaient trop des stations, trouvaient et attaquaient les cordons les moins bien gardés. Elles l’envahissaient, et repartaient systématiquement avec au moins un homme qu’elles traînaient derrière elles avec leurs crocs. Des saloperies quadrupèdes grisonnantes et grosses comme des bergers allemands, avec une morphologie de rat aux pattes de fauve. Et elles attaquaient par groupe d’au moins cinq individus, ne se dévoilant qu’au dernier moment.
Toutes lampes allumées, le contingent armé s’était engouffré dans les voies du tunnel en abattant le moindre spécimen rencontré. Du gâteau, celles-ci étant un peu trop épaisses pour fuir à travers les conduits d’aération. Il y en avait beaucoup plus que ce qu’ils imaginaient, mais elles étaient faciles à abattre ; si bien que jusqu’à ce qu’ils arrivent à la station suivantes, on prenait des paris pour savoir qui allait en tuer le plus. Et tout était parti en vrille.
Les plus petites allaient chercher de quoi nourrir les plus grosses. Et les plus grosses faisaient la taille d’une Lada. La bataille avait fait rage pendant une bonne heure. Les deux camps avaient subi de lourdes pertes, mais la victoire leur tendait les bras.
Le dernier souvenir de Chris, était la sensation de se faire arracher au sol vers sa gauche. Puis l’inconscience.
Quand il avait fini par se réveiller, il était dans un tunnel de service. Il se sentait traîné sur le sol, et pendait sous la panse d’une bête massive. Il prit quelques secondes hésitantes avant d’agir : à peine il avait fait cliqueter le cran de sûreté de son arme pour en vérifier sa position, la bête hurla. Et il fit tonner une rafale sous l’animal, dans son poitrail. La bête s’était affaissée, morte, le laissant seul et isolé dans un couloir obscur et inconnu.

Chris plia et déplia son coude pour s’assurer du maintien du bandage, avant de souffler. Quelle merde.

Vingt ans qu’il était coincé de ce foutu trou à rats. Et ça n’avait jamais été facile, surtout pour quelqu’un dont les souvenirs du monde étaient encore présents. Il avait du s’habituer à la crasse, aux mauvaises odeurs, aux repas devenus bien plus fades que les pires rations militaires qu’il lui ait été donné de goûter. Il en était encore exaspéré, quand un jeune croquait dans un travers de porc avec le sourire bienheureux, de se dire que la même viande pouvait avoir mille autres saveurs que le gras de la viande. Et ces douches au savon qui lave à peine. Les guerres de faction, les bandits, les attaques de monstres difformes. Cette putain de monnaie qui fait vivre en semant la mort pour devenir inutile. Ces gens de plus en plus abrutis, animalisés au point de n’être qu’un ramassis de trous du culs égocentriques même dans les sphères se prétendant érudites de Polis. Et il rêvait de pouvoir enfin se barrer loin de là.
Au lieu  de ça, il était assis. Épuisé. Le bras en miettes, et la faim au ventre. La gamelle de porc aux champignons était encore plus fade aujourd’hui. Il n’en pouvait plus. Il n’avait plus la force de s’offusquer, de s’énerver et de s’éreinter à se battre pour un coin où dormir moins crasseux que son prochain. Et puis pour quoi faire ? Rester un mois, un an de plus à subir la crasse, et se sentir à l’étroit dans un enclos. Un putain d’enclos à bétail.

Soudain, il commença à entendre comme un râtelage tout autour de lui. Comme une multitude de griffes raclant le sol pour s’approcher de lui. Christian posa doucement sa gamelle vide au sol, et reprit sa lampe en main pour balayer l’endroit. Il pouvait deviner des ombres qui fuyaient le halo de la torche pour se soustraire à la vue. Il brassa l’air en tournant son bras gauche autour de son épaule, avant de ramasser sa kalachnikov et de passer la bandoulière autour de son cou. Puis il dirigea la lumière dans la station sans plus se soucier de la menace se faisant bien plus présente et tangible dans l’ombre autour de lui.
Là, son issue. Une possible mauvaise idée, mais la seule qu’il puisse avoir. Il se leva, fixa la lampe au canon au rouleau de bande adhésive, et endossa son sac à dos.

Chris se mit à marcher lentement, avec nonchalance. Il refit cliqueter le cran de l’arme, pour vérifier la position du sélecteur. Un bruit arriva sur sa droite, il braqua lampe et canon dans un réflexe instinctif à la rapidité inouïe de son passé de soldat à la surface. Deux détonations, et le putain de rat-berger allemand s’effondra au sol sans une plainte. Il descendit sur les voies, remonta sur le quai d’en face, braqua à nouveau son arme sur la gauche pour fusiller une seconde cible. Des feulements se firent entendre derrière lui et sur les côtés. Mais il n’en avait plus rien à faire. Il était calme. Il continua sa route vers l’escalator.
Il ne ressentait plus la moindre tension. Il ne ressentait plus cette sensation de risquer sa vie, d’avoir peur de la perdre. Il mourrait bientôt de toutes façons. Soit dévoré dans l’antre d’un mutant, soit brûlé par les radiations.
D’autres créatures se jetèrent sur lui. L’arme tonna encore, dans une tempête aveuglante de gaz et du feu. Il remontait l’escalier mécanique en donnant dos à la surface, abattant la moindre gueule pleine de crocs qui s’aventurait devant sa lampe. Il rechargea avec hâte, poursuivit son office avec froideur.

Puis il en rêvât encore. Que quelqu’un l’attende encore au pays. Même vingt ans après, même après avoir pleuré sa mort. Quitte à ce que sa tête blonde ait refait sa vie, tant qu’il puisse se plonger une dernière fois dans le glacier chaleureux de ses yeux.
Allez. Tous. Vous-Faire-Enculer.

Christian tourna les talons au sommet de l’escalator et avala une bouffée d’air froid, avant de se mettre à sourire béatement. Puis ses pieds commencèrent à le porter, et il se mit à courir en frappant ses bottes ferrées sur le sol. Il ne reconnaissait pas le boulevard qui s’étendait devant lui. Il sentait un sale arrière-goût dans sa bouche, mais il était content. Il n’avait plus qu’une idée en tête, partir. Partir tout droit, laisser les tunnels et leurs saloperies immondes derrière lui, et ne plus se retourner. Jusqu’à il ne sait où, sans même savoir si du nord, de l’est ou du sud il fait son cap.

Quitte à crever, autant avoir l’impression d’être libre. Dieu seul sait s’il fera un ou cent kilomètres avant de s’effondrer.

Adieu, Moscou.
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ILK-Feli
Invité
Dim 15 Mar - 22:55
Hrp :


It's cold outside.



S'il y avait bien quelque chose que Feliciano ne possédait pas c'était un sens de l'orientation. Alors explorer une cave immense, pleine de recoins, sans accompagnement ne fût pas son idée la plus ingénieuse depuis longtemps. On n’est pas sérieux quand on a seize ans.

Épuisé, Feliciano prit place sur un rocher trouvé à tâtons dans cette grotte qui n’aurait laissé filtrer aucune lueur. Le noir n’effrayait pas l’Italien, il le dérangeait, pourtant il pouvait toujours apercevoir la lumière salvatrice - principalement métaphorique - au bout du tunnel, celle qui le délivrerait de ses tourments, quels qu’ils soient. Voir le côté positif était probablement sa plus grande qualité, celle qui pouvait aider n’importe qui dans son entourage.

Un rire lui échappa. Il pensait à Kenneth qui n’aurait pas supporté se retrouver à ses côtés en ce moment même. Peut-être que sa dextre aurait saisi la sienne, tremblante, tandis qu’il murmurait qu’étant le plus âgé, il devait les protéger. Son camarade universitaire, la boule au ventre, finirait par abandonner et Feliciano, un sourire aux lèvres, l’aurait apaisé d’une douce musique. Comme cette fois, une panne de courant dans la salle d’art, le plus jeune s’était emparé d’une guitare et avait joué le troubadour avec quelques petites chansons idiotes inventées sur le moment pour tirer des sourires à son comparse.

Depuis combien de temps marchait-il à la recherche de la sortie ? Son ventre criait famine, se tordait dans tous les sens pour s’auto-digérer. Feliciano n’avait peut-être pas encore intégré le cursus de Médicomagie, mais il n’était pas étranger à ses symptômes. Si la faim le tenaillait de la sorte, voilà plusieurs jours qu’il parcourait cette grotte. Il se rappelle avoir dormi sur un sol dur et froid quatre fois - cependant il nécessitait beaucoup de sommeil, cela ne voulait peut-être rien dire -, encore une preuve qu’il y parvenait partout, sans que cela ne lui pose problème. Son sommeil lourd était un cadeau du ciel.

Si Louis l’avait vu partir, Feliciano était certain qu’il se serait assuré que son sac était plein de nourriture et d’eau au cas où, car il connaissait la tendance du roux à se perdre n’importe où. Un jour il trouverait le moyen de s’égarer dans une boîte fermée où il se blesserait sûrement avec une écharde dépassante. L’idée que Louis se comportait comme un grand frère à son égard lui tira un sourire doux.

Toutes ses amitiés résultaient un peu ainsi, des élèves plus âgés qui le prenaient sous leur aile pour le protéger de la vie et de sa propre naïveté. Feliciano, qui désirait plus que tout une grande famille à l’instar de la sienne, en possédait une à Ilukaan. Un vœu incompréhensible pour beaucoup, principalement des camarades ayant un nombre conséquent de frères et sœurs. Toutefois, il se laissait adopter par les autres, voire même couver par certains. Ce qui ne changeait pas réellement de son grand frère de sang à vrai dire.

Comme l’évolution de l’espèce humaine ne l’avait toujours pas pourvu d’une nyctalopie, il était incapable de discerner les insectes aux alentours, mais les bruits significatifs lui donnaient des frissons dans le dos. L’adolescent regretta amèrement sa baguette, brisée quelque part sur un rocher contre lequel il avait trébuché, ce qui l’obligeait depuis trop longtemps à longer le mur, sa senestre apposée contre la paroi froide et humide. Cette humidité causée par la mer qui renvoyait ses effluves grâce au vent soufflant de fortes bourrasques, s’engouffrant avec violence dans ce dédale de pierre.

Francis aurait été dégoûté par les insectes, aurait prit en haine ce vent dans ses cheveux qui le décoifferait, mais plus que tout, l’humidité aurait sûrement fait gonfler sa tignasse sans qu’il n’ait la possibilité de s’en rendre compte. En vérité, avant de penser à cela, Francis aurait certainement trouvé une solution et la sortie, sans trop de problèmes.

Feliciano les adorait tellement qu’il les plaçait peut-être sur un piédestal trop haut, mais celui qui l’aurait réellement sauvé était Ludwig. Le plus compétent de son entourage scolaire confondu, sans le moindre doute, accompagné de Kiku, bien qu’ils ne se supportent pas, ils fournissaient des efforts dernièrement. Cela pouvait se terminer en amitié, personne n’avait la réponse à cette interrogation. L’Allemand aurait prit de quoi dessiner une carte, noter leur chemin, laisser quelque marques pour retrouver leurs pas, et, surtout, n’aurait pas cassé sa baguette ; de ce fait ils ne seraient pas dans le noir complet, ses rations seraient bonnes pour des jours, peut-être même des semaines. Il l’aidait déjà beaucoup avec ses devoirs...

« Je t’en prie, viens me sauver..., murmura-t-il, désespéré. Je t’en supplie Ludwig... »

Ses doigts se soulevèrent pour essuyer des larmes roulant lentement sur ses joues rondes. Les yeux fermés, il l’imagina plus que clairement sous ses yeux, et les perles salées redoublèrent. Jamais il ne pourrait revoir son visage si sérieux en toute circonstance, même quand il entendait des blagues ou était témoin de l’idiotie de ses camarades, présente pour le dérider. Son regard, d’un bleu profond qu’il appréciait observer, froid mais couvant une chaleur sans fin. Feliciano commençait à bien le connaître, voir le nounours sous cette carrure de grizzli. Malgré tout, il l’aimait sincèrement, et il ne pourrait jamais lui dire.

Car il mourrait ici, perdu, seul, abandonné.

« Una volta che avrai spiccato il volo... »

La douce voix de l’Italien s’éleva dans la grotte, résonna contre les parois. Le rythme n’était pas approprié à l’adaptation, il rendait cette chanson plus douce, plus calme. Un accompagnement au violon serait parfait.

Roméo serait la personne appropriée pour cela. Un sanglot déchirant lui échappa alors que l’image de son petit frère s’imposait à lui. Si jeune, il nécessitait encore son aide dans bien des domaines, pour des devoirs comme pour découvrir le monde loin de leurs parents restés en Italie. De trois ils passeraient à deux enfants. Roméo ne comprendrait probablement pas comment cela avait pu arriver, il n’idolâtrait pas son frère aîné, cependant à ses yeux il restait invincible, à l’image de Lovino.

Lovino... Son jumeau, celui qui avait partagé un ventre pendant neuf mois, avec qui il s’était battu des douzaines de fois, qu’il avait mordu et griffé, pourtant ils s’étaient toujours rabibochés. Leur rivalité enfantine débordait sur leur adolescence, à celui qui serait le premier à réaliser n’importe quoi. Inséparables depuis toujours, Ilukaan les éloigna de force, des maisons différentes pour des magies différentes. Feliciano avait pleuré toute la nuit après la répartition. Sa voix tremblait, pourtant il ne s’arrêtait pas de chanter, les yeux clos. Lovino devait ressentir sa détresse depuis un moment, dans ce lien si particulier qu’ils partageaient, rendu plus puissant grâce à la magie. Peut-être qu’il le cherchait grâce à cette sensation, qu’il avait prévenu tout le monde.

Pour une fois chez Feliciano, l’espoir était faible, presque éteint. La lumière du bout du tunnel il ne l’apercevait pas.

Son esprit s’égara lentement, s’attardant sur ses parents, qui ne comprendraient pas comme l’école avait pu le laisser s’égarer ainsi. Perdre un enfant était la douleur morale la plus dure au monde, le leur faire subir était une abomination pour lui qui s’évertuait à ne leur donner que joie et amour. Sa mère subissait déjà assez de tristesse en étant éloignée de ses parents qui refusaient de la voir sous prétexte qu’elle était une sorcière. Ils ne souhaitaient plus l’avoir dans sa vie, ils ne désiraient même pas connaître leurs petits-enfants ! Lovino était toujours révolté de cela, souvent calmé par le tempérament doux de son jumeau. Un jour viendrait où ils seraient acceptés sans problème par leur famille.

Le froid le secoua, un frisson remonta le long de son échine, sa voix continuait la chanson sans plus trembler.

Son ventre hurlait famine, il le couvrait de paroles.

Ses jambes ne le porteraient plus.

Alors qu’il fermait les yeux, exténué, une petite voix dans sa tête lui intimait de rester éveillé, de continuer et de se battre. Feliciano n’avait jamais été lâche, il fonçait même sur les autres étant plus jeune, un trait de caractère emprunté à son côté escrimeur. Pourtant à cet instant il ne parvenait pas à lutter, et une dernière palabre résonna.

« Lì a casa il cuore sentirai... »

Autour de lui il discernait sa maison, sa chambre, sa famille… Un sourire étira ses fines lippes. Peut-être qu'il les verrait une dernière fois finalement.

Il était si fatigué.



Ce n’est que cinq jours après la disparition de Feliciano qu’il fut retrouvé, allongé sur un rocher dans la caverne, par son propre père, prévenu de l’incident et qui avait rejoint les recherches sans laisser le choix à quiconque. A l’hôpital, Lovino, brisé et dont les larmes coulaient à flot, murmura d’une voix craquée, à son frère qui le narguait de son sourire perpétuel.

« Tu as gagné espèce de bouffon, t’es fier ? Tu l’as fait en premier, tu es mort avant moi... ».
© 2981 12289 0



Pour ceux qui ne parleraient pas italien :
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Ax[SNKR]
Invité
Dim 15 Mar - 23:33
Spoiler:






Épreuve 6 : Le bout du tunnel  Winter-snow-nature-animated-gif-7






La neige continuait d'étendre son manteau blanc. Les flocons tombants inexorablement. Lui, qui ne portait que son uniforme beige habituel, commençait à se fondre avec le reste du décor. Petit à petit, les petites larmes glacées décidaient d'en faire un des leurs. Le ciel pleurait... Lui aussi. Malheureusement, Arndt ne pouvait rien pour lui. Néanmoins, ce soir, l'un comme l'autre n'avait aucunement besoin de se cacher. Après tout, les larmes sèchent plus vite que le sang.  

Alors, c'est comme ça que je vais mourir ?
Cette phrase résonnait dans le moindre centimètre carré de son subconscient.  
Alors, c'est comme ça que je vais mourir ?
Cette phrase brûlait ses entrailles malgré le froid mordant de l'hiver.  
Alors, c'est comme ça que je vais mourir ?
Cette phrase taquinait son instinct de survie.  
Alors, c'est comme ça que je vais mourir ?
Oui. Tu vas mourir.  

Sa main glissa tendrement contre la poudreuse dans un léger bruissement. Cette mission était une erreur. Ces derniers mois étaient une erreur. Son existence était une erreur. S'il l'avait accepté, c'était à cause d'elle. S'il l'avait refusé... Cela aurait sans doute été pour elle.

Est-ce que tout cela en valait bien la peine... ? Non certainement pas... Le cœur à ses raisons que la raison ignore. Quant à lui, il ignorait pourquoi s'était tombé sur elle. Sans doute pour ses qualités... et encore plus pour ses défauts. Il aimait son sourire, ses manières, ses contrariétés. Il aimait tout chez elle. Et elle... Elle ne l'aimait pas D'un ultime geste, il leva doucement la main vers cette mer des âmes, qui l'appelait incessamment. Devait-il y aller ? Oui ? Non ? Peut-être n'en avait-il pas le droit...  

« Tu sais. Je voulais seulement danser dans tes bras pendant des heures... Même si je savais qu'un autre y dansait déjà. Mais je crois que pour les gens comme moi, les rêves n'existent pas... Hein ? »

Malgré le froid... Il parvint à articuler quelques mots de ses lèvres tremblantes. Depuis combien de temps attendait-il là ? Des minutes ou bien des heures ? Il ne savait pas vraiment.  

« Dis. Quand je ne serai plus qu'un souvenir... Est-ce que tu m'oublieras ? »

Bizarrement, il ne trouvait pas le temps long. Attendre, l'attendre, c'est pourtant la seule chose qu'il n'avait jamais su faire. Alors, attendre quelques minutes de plus n'était pas dérangeant. Et puis, même s'il était un peu en retard, personne ne l'attendait. Il avait le droit de se faire prier, un peu.  

Il referma alors doucement la main pour se saisir de tout... Et de rien. De l'infinité et du néant. Du présent du passé. En y réfléchissant, il venait peut-être seulement d'écraser ses rêves et ses espoirs. Une perle salée roula le long de sa joue... Et il jeta un dernier regard au ciel.

« Désolé. Je pars en premier. »






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LeFollet
Invité
Lun 16 Mar - 0:13
SOUVENIRS
Épreuve 6 : Le bout du tunnel  421-26

Madelle et le Follet:

Mealladh se souvenait avoir été jeune. Ses souvenirs étaient aussi confus que son esprit, peut-être même les deux allaient de pair. Mais dans la tourmente de son âme malade, il arrivait au jeune Liare d'avoir des réminiscences de son enfance, des joies et des jeux qui avaient été les siens. Toucher du doigt ces souvenirs était ridiculement difficile, ils filaient entre ses phalanges comme autant de petits morceaux de brume que le vent emporterait au loin. Ils avaient une odeur de cendre et de métal, de regrets et de non-dits.
Ladh n'aimait pas s'y pencher trop souvent.

Pourtant, parfois, ces réminiscences apportaient du bon. Quelques nuits auparavant, le Liare s'était adossé contre les parois lisses du souterrain et une bribe de souvenir avait surgi au détour d'une pensée fantasque. Il s'était alors revu, enfant, courant dans les grandes rues de Glasgo pour fuir un père trop sévère et une mère trop protectrice. Les autres Liares l'observaient, leurs hautes cornes couvertes de riches parures, surpris de voir un enfant de son rang aussi loin de la demeure familiale. Ladh n'avait qu'une envie : rejoindre les grands volcans de l'est, là où les plus grandes épopées de dragonniers liares avaient lieu. Mais tout à son âge incertain, il s'était perdu dans les ruelles sinueuses qui bordaient la muraille, et épuisé il s'était laissé choir contre un mur.
De sa position, il avait alors pu admirer la cime des géants endormis au loin, leurs hautes têtes dégarnies cotoyant les cieux comme autant de champignons célestes.
Dans les souterrains, le Follet n'avait pas une aussi belle vue. En levant les yeux, il ne pouvait qu'observer la charpente de pierre et de métal d'un tunnel aussi sinistre qu'il était encrassé. Le gris était une couleur qu'il trouvait particulièrement ennuyeuse, elle n'avait pas l'attrait du noir ni la beauté du blanc, mais c'était la seule touche de lumière qui s'offrait au regard du Liare. Etre contraint à la réclusion sous terre ne l'enchantait aucunement, la compagnie y était rare et les survivants étaient aussi lassants vivants qu'ils ne l'étaient morts. Ladh se languissait de sa liberté d'autrefois, avant le Désastre comme il aimait appeler la débâcle qui avait contraint les habitants de Madelle à se réfugier sous terre dans les constructions que les humains avaient accumulé avant de perdre la guerre contre les Récleyès. Personne n'avait gagné la guerre, en réalité. Uraang1 lui-même avait dû s'amuser de cette triste ironie.

Errant seul dans un tunnel sans fin, les souvenirs de Ladh, bien que rares et confus, lui avaient apporté des pensées plus lumineuses que le soleil qui ne brillait plus à l'extérieur. Jamais un être aussi impulsif et imprévisible que le Follet n'aurait un jour pensé que se laisser aller à ses propres pensées pouvait être plus agréable que le monde extérieur, puisse ajouter de la couleur à un chemin qui en était dénué. Cela faisait des jours qu'il marchait, et le temps s'égrenait sans qu'il ne puisse l'en interdire. Le monde extérieur était inhospitalier et le monde souterrain était vierge d'intérêt. Les survivants se faisaient rares, la solitude du Follet agrandissait le vide que son âme comblait tant bien que mal par le chaos de ses actes, mais se laisser aller à ses souvenirs trompaient quelque peu ces désagréables ressentis.

Parfois, lorsqu'il s'arrêtait au détour d'une station moins humide que la précédente, le Follet s'amusait à dessiner sur les murs les volcans de Glasgo.

La faim et la solitude le tenaillaient, mais l'ennui était plus douloureux que les crampes qui ravageaient son crâne et son estomac. Une nuit, cette sensation le submergea si fort qu'il crut mourir. La nausée le broya tout entier et il ferma les yeux pour tenter de la freiner. Ladh n'avait jamais eu une bonne notion du temps, si bien qu'il était incapable de dire depuis combien de jour il avançait seul dans cette station.
Un souvenir gratta à la porte de son esprit.

Ladh n'aimait pas s'y pencher trop souvent. Pourtant, il le laissa entrer. Il voulait revoir les volcans de Glasgo, sentir l'odeur de la chaleur et des braises luisantes au petit matin, entendre les murmures d'une ville en éveil.

Le souvenir n'était pas de cet avis.

Ladh se remémora alors sa première rencontre avec Onyx. Il se souvint sa douleur et son désespoir après avoir gravi le Mont Togern en quête de ce dragon que les légendes situaient si bien. On le disait plus noir que la nuit, plus fier que le jour, plus dangereux que les flammes que faisait danser Simius au petit matin.

Et il l'était.

Lorsque Ladh posa ses yeux sur cette créature d'écailles et de crocs, aux quatre yeux d'un rouge plus intense que le sang qui perlait sur ses jambes écorchées, il envia sa puissance et tout son cœur se mit à chanter à l'idée de rejoindre les légendes qui avaient bercé son enfance. Il n'eut pas peur : jamais il ne craignit cette créature malgré toute la violence dont elle était capable. L'arrogance de la jeunesse et la soif de liberté, ces deux traits d'esprits avaient suffi à calmer les ardeurs du monstre noir. A cette pensée, le Follet eut un sourire. En compagnie de son dragon, il s'était toujours senti fort. Son agressivité répondait à la fougue du Liare perturbé, ils se tenaient compagnie dans une folie douce et réciproque.

Il lui manquait terriblement. C'était la première fois que Ladh le réalisait.

Pourtant, une sensation bienheureuse de chaleur se répandit dans son torse tandis que le souvenir s'estompait. Sur ses doigts, le Follet pouvait encore sentir le contact rugueux des écailles épaisses du dragon fou, et il s'en sentit rasséréné, bercé par le murmure familier d'un ami d'autrefois. Son sourire se transforma, bien moins malicieux qu'à l'ordinaire, bien plus doux.

Doté d'une nostalgie qui n'était pas coutumière au Liare déchu.

La douleur qui l'immobilisait dans l'obscurité du tunnel ne disparut pas, au contraire. La sensation au bout des doigts du Follet s'amplifia jusqu'à devenir douloureuse, remontant ses membres jusqu'à sa nuque qu'elle embrasa dans une douloureuse brûlure que le Follet ne comprit pas. Tout à son inconfort, il rouvrit les yeux.
Il n'était soudain plus dans le tunnel. Toujours assis contre une paroi, il vit les flammes lécher l'obscurité, déchiqueter les murs d'un immense manoir à l'agonie. Un étau se referma sur la poitrine de Ladh. De la culpabilité ? Non : il ne s'était jamais senti coupable pour ce jour là. Il n'y avait jamais réellement repensé. Le passé lui avait toujours semblé vierge d'intérêt.

Mais dans les ruines de la civilisation, dans la douleur de la solitude, qu'avait-il d'autre que le passé ? Ce dernier gorgeait son regard de visions d'un autre temps. Le Follet se savait dément, mais il n'avait jamais expérimenté d'images aussi réelles. Parmi les flammes dont la chaleur familière prenait des accents de souffrance, il aperçut la silhouette de son frère. Immobile. Ecrasé. Désarticulé.

Déjà mort.

Cette image le fit suffoquer tandis que la fumée pénétrait ses narines et sa gorge irritée. Le Follet remua, il ne voulait plus de ce souvenir, il ne voulait plus se souvenir. C'était ridiculement douloureux. Qui avait besoin du passé ? Personne. Pas lui. Où était Onyx ? L'avait-il abandonné ?? Andrihr. Pardon. Notre père était un imbécile. Qui ? Son père ? Il était mort. Comme Onyx.

Le souvenir se dissipa aussi brutalement que les griffes qui se refermèrent sur le bras du Follet. Dans le noir du tunnel, ce dernier observa la plaie qu'il venait de se faire. Le sang dessinait la silhouette de son membre dans l'obscurité, la chaleur n'avait rien de l'ardeur des flammes, mais Ladh la préférait sans hésitation.

Il eut un gloussement.

Il se mit à ricaner.

Il éclata de rire.

Le Follet allait mourir ici, de faim, d'ennui peut-être. Il le savait. Il s'en fichait.

Il n'avait pas besoin de ses souvenirs et de son passé pour savoir qu'il avait aimé sa vie. Qu'il avait aimé le chaos qu'il avait semé aux côtés d'Onyx. Qu'il avait aimé être libre, loin de son père, loin de sa patrie, loin des volc-...

Par Simius. Comme les volcans de Glasgo lui manquaient.

LEXIQUE:
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Audebert
Invité
Lun 16 Mar - 0:18
HRP - Esquisse et Audebert:

Comme je descendais des chemins tout de fer,
Je ne me sentis plus guidé par les glissières :
Des couloirs noirâtres les avaient englouties
Les ayant celées, avec moi et mes outils.

J'étais insoucieux de tous les alentours,
Passants éventuels ou décor sombre et lourd.
Quand avec les rails ont fini mes rêveries
Le silence m'a là fait quitter ma féerie.

Dans les clapotements indiscrets de mes pas
Moi l'autre époque moins brave face au trépas,
Je courus ! Et les noirs souterrains désertiques
N'ont pas subi cavalcade plus anarchique.

La moiteur a béni mes éveils caverneux.
Plus pesant qu'un buffle j'ai recroisé les nœuds
Qu'ont créés les chemins, tangible amphigouri,
Dix fois, sans rappeler l'ordre des galeries !

Plus grasse que la poix de facture artisane,
L'eau sale pénétra mes bottes de basane
Et des doutes sur le luxe de ces parages
Me lava, dispersant aisance et puis courage

Et dès lors, je me suis baigné dans le Poème
De l'aventure, errant seul, et de la bohème,
Redécouvrant la peur, l'effroi ; où j'avais vu
Merveille avant, j'étais là de joie dépourvu ;

Où, ignorant le danger l'avais-je bravé,
Du rythme des récits m'étais-je bien gavé,
Plus forte que l'alcool, plus vaste que vos lyres,
Fermentait l'essence même de mon délire !

Je sais les cieux crevant en éclairs, et les trombes,
L'aube exaltée ainsi qu'un peuple de colombes
Et les ressacs et les courants : Je sais le soir,
Et j'ai vu quelque fois ce que l'homme a cru voir !

J'ai vu le soleil bas, taché d'horreurs mystiques,
Des ruines de forts empreints de drames antiques
Abritant d'immenses créatures ailées,
En les voyant j'eus l'impression de voler !

J'ai rêvé la nuit blanche au neiges éblouïes,
En mon corps circulaient des sèves inouïes,
Au travers mes voyages prennais-je hauteur,
Et en moi se fit l'épique éveil du chanteur !

J'ai conservé, des règnes durant, ma superbe
Sans songer que les pieds lumineux de mon verbe,
Dépendants de la bien portance de mon être,
Pussent à mon instar avoir à se soumettre.

J'ai heurté, savez-vous, d'innombrables écueils
Mêlant aux rires moqueries pour tout accueil.
Diantre ! Des commentaires tous à fleur de peau
Sous couvert de norme mollarde le troupeau !

J'ai vu fomenter des complots idiots, et nazes,
Où pour blessure sied ma figure pantoise !
Des écroulements, ils rient au centre des places
Et soupirent après la perte de ma face !

Glaciers, soleils d'argent, flots nacreux, cieux de braises !
Où les serpents géants dévorés de punaises
Choient, des arbres tordus, avec de noirs parfums,
Échouages hideux au fond des golfes bruns !

J'aurais voulu montrer aux enfants ces dorades
Du flot bleu, ces poissons d'or, d'argent ou de jade.
Des écumes de fleurs ont bercé mes errances
Et d'inneffables vents m'ont ailé par instances.

Pourtant, martyr lassé des pôles et des zones,
J'ai repris mon périple, sachant ce qu'en vaut l'aune.
La mer, la route, leurs sanglots me rappelaient
Et j'y restais, m'écrivant à chaque relai...

Chroniqueur, balottant sur mes bords les querelles
Et puis les fientes des fielleuses brêles
Et je voguais, lorsqu'à travers quelques mulons
Des noyés descendaient dormir, à reculons !

Or moi, bateau perdu dans l'instinct de ma transe,
Jeté par l'ouragan dans l'éther et sa danse,
Moi que les menteurs et persifleurs conspuaient,
Devant leur défilé je suis resté muet ;

Ivres, puants, ils riaient, fiers comme ramures,
Moi qui trouais le ciel rosoyant comme un mur
Qui porte, confiture exquise aux bons poètes,
Des lichens de soleil et des morves bleuettes,

Qui courais, taché de rancœurs acides et sèches,
Fou, embrumé par des blessures encor fraîches,
Quand les mots des autres étaient des coups de triques
Les cieux ne me couvraient plus, cadavérique

Moi qui tremblais, sentant geindre à cinquante lieues
Badauds riant dessus scrupules bilieux,
Fileur éternel des apophtegmes d'autrui,
Je regrette l'heure où je n'étais point instruit !

J'ai vu des archipels sidéraux ! et des îles
Dont les cieux délirants sont ouverts aux idylles :
Est-ce en ces nuits sans fond qu'aurait dû avoir peur,
Moi-même, mon être, Audebert, le Chroniqueur ?

Mais, vrai, j'ai trop pleuré ! Maintenant, guère fier
Toute lune est atroce et tout soleil amer :
L'âcre orgueil m'a gonflé de torpeurs enivrantes.
Ô remords accablants ! Ô tristesse écœurante !

Car de tous mes récits, il manque un élément !
Je me souviens les eaux, les terres, les vents,
Je me souviens les détours et les tempêtes,
Je me souviens moi, ma personne et mes quêtes.

Je ne puis plus, baigné de mes langueurs, oreilles
Fidèles, me cacher à l'ombre d'une treille,
Ni conserver l'orgueil qui me gardait des coups,
Car ce dont je ne me souviens pas, c'est vous.
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