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Anna Volkovar
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Anna Volkovar
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Jeu 30 Nov - 17:40
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Dix jours après la fin du blocus

Anya inspira un grand coup, un sourire menaçant d’étirer ses lèvres. Les yeux mi-clos, la tête rejetée en arrière, elle se laissait aller contre le dossier de sa chaise de fortune : une caisse en bois recouverte d’une épaisse couverture de laine. Quand elle avait franchi les frontières de Polis, elle avait été tentée de se courber pour embrasser les rails de sa faction natale. Le geste n’avait rien de très original mais l’idée lui avait tout du moins tiré un sourire. Et à présent qu’elle avait repris ses quartiers, constatant de menus changements au sein de la station, elle s’était tout simplement laissée aller contre son fauteuil de fortune.

Et voici où en étaient les pensées de la jeune femme lorsqu’elle fut interrompue par un bruit discret sur le seuil de son office. Soupirant, grommelant un peu, elle se leva et invita le visiteur à entrer et se présenter, priant intérieurement pour qu’il ne s’agisse pas de travail. Anya n’avait regagné sa station uniquement quelques heures auparavant. Elle avait à peine eu le temps de s’enquérir des dernières nouvelles, principalement à propos de ses proches. Pour le moment, les événements politiques ne l’intéressaient pas vraiment. Et puis, sans aucun doute possible, ils sauraient rapidement venir vers elle.

A cette idée la jeune femme grimaça un peu et repoussa ces idées. Sur le seuil de son modeste cabinet apparaissait une silhouette familière. Anya cligna des yeux à deux reprises puis laissa fleurir un sourire sur ses lèvres tandis qu’elle s’avançait. En deux enjambées elle parvenait à la hauteur de la jeune femme à la crinière flamboyante. Elle s’arrêta devant elle, la considéra de pied en cap et hocha vivement de la tête. Une main vint se poser sur son épaule, chaleureuse, tandis qu’elle lui offrait un sourire sincère.

- Yulia Alekseïevna, je suis vraiment contente de te revoir !

Dans l’intimité de son bureau, la chirurgienne avait abandonné sa froideur habituelle. Elle recula d’un pas et, d’un geste ample de la main, invita son amie à s’asseoir sur la caisse qui lui servait de tabouret quelques secondes plus tôt. Elle se déplaça ensuite vers le meuble sur lequel était disposé la plupart de ses outils et en sortit un vieux contenant d’acier rouillé qui avait, par le passé, conservé relativement bien la chaleur. Pour l’heure, il en coulait un thé tiédit qu’elle versait dans deux tasses.

- Bon sang je n’aurais pas cru que Polis me manquerait autant ! Bon je n’avais pas vraiment imaginé la quitter aussi longtemps en rejoignant les stations V.A.R.  Raconte-moi un peu tout ce qui s’est passé entre temps s’il te plait.

La jeune femme interrompit son débit de parole pour tendre une tasse à l’encontre de la libraire. Elle la détailla une nouvelle fois du regard puis tira à elle une autre caisse sur laquelle elle s’assit.

- Aurais-tu par hasard déniché quelques bouquins digne d’intérêt ?

Toute aussi heureuse qu’elle était de retrouver un visage familier, Anya n’en oubliait pas le sens des affaires.
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Dim 3 Déc - 15:10
Elle divague dans la forêt, effarouchée maintenant qu'elle n'a plus de refuge, plus de corps protecteur. Elle n'a pas le sens du temps, elle vit au creux de l'instant, mue par la faim, la soif, la fatigue. Elle n'est que vie encore fragile, déjà taraudée par le rude et obstiné désir de continuer à croître, elle respire avec avidité le monde qui l'entoure. Ce monde aussi attrayant, que terrifiant. Elle gémit faiblement, à bout de forces et finit par se coucher sur un lit de mousse, au pied d'un arbre immense dont les branches disparaissent derrière les nuages, tout là-haut.
Le monde lui est à la fois opaque et évident, elle ne le réfléchit plus, jamais elle ne s'étonne devant lui, elle se tient, simplement, en son sein. L'espace alentour, aussi beau soit-il par endroits, ne fait pas pour elle paysage, elle ne le contemple pas, elle pose sur lui un regard lisse, luisant de candeur. Elle le hume, elle le respire par tout son être, les yeux mi-clos. Elle l'inspire et l'expire à une juste cadence ; tel est le dialogue qu'elle entretient avec lui – un continuel et pénétrant échange de souffles.
Son haleine est chaude, elle imprègne de moiteur le silence que sans cesse elle ressasse. Son silence est écoute et manducation de la vie en elle, autour d'elle. Elle est en placide accord avec la terre, elle fait corps avec elle. La terre, la vie, sa chaire, le sang qui circule dans ses veines, c'est tout un. Elle n'est que brut et vigoureux désir de vivre qui oscille entre âpreté, effroi et volupté.
Quand elle ouvre les yeux, la nuit est tombée : froide, glaciale, opiniâtre ne lui laissant aucune chance de se rendormir et de retrouver la sérénité du sommeil qu'elle ne sait conserver à son réveil.
Se relevant prestement, elle se décide à reprendre la route, qui plus est la faim et la soif la taraude furieusement. Elle marche au hasard ou peut-être suit-elle un chemin qu'elle connaît bien pour l'avoir souvent emprunté.
Elle ne réfléchit pas, ses pieds la mènent ainsi que le faisait les sabots d’une bête, au soir quand la faim, la soif, la fatigue la conduise vers l'abreuvoir. Mais elle n'a plus de lieux d'ancrage, de repos en vue pourtant, elle se laisse guider par ses sensations nouvelles,... La douleur de la perte, la douceur de la solitude, le nœud de colère qui ne cesse de croître en son cœur et ne demande qu'à exploser, à se venger, à oublier.


Yulia se réveilla difficilement ce matin là, elle avait fait un rêve étrange et une envie inextricable de courir jusqu’à en mourir l’envahissait de la tête aux pieds. Repoussant ses draps elle rejoignit rapidement sa salle de bain et plongea sa tête dans un bac remplit d’eau tiédasse, elle resta plusieurs temps en apnée jusqu’à ce qu’il ne reste plus une seule goutte d’air dans ses poumons. Enfin, elle sortit la tête de l’eau, essoufflée mais vidée des derrières toxines de son cauchemar. Elle avait sentit le vent sur sa peau, elle avait sentit la terre sous ses ongles, l’odeur de la forêt, il fallait absolument qu’elle pense à autre chose.
Ni une ni deux, elle s’habilla prestement et saisissant son sac au pied de son lit, elle partit en direction de la cuisine. Sa grand-mère s’y trouvait, attablée devant son café quotidien, lisant le dernier journal de la station.  

- Bonjour ma chérie, comment vas-tu ? Tu as bien dormi ?

Yulia fit le tour de la table et alla se servir une tasse de café en n’oubliant pas de coller un baiser sur le front de la vieille femme qui l’avait élevé.

- Pas très bien, j’ai fait un rêve étrange. Et toi ? Je vais aller voir Anya Nikitovna aujourd’hui, elle est revenue exercer à Polis, j’ai trouvé un livre pour elle, j’en profiterai pour lui parler de mon rêve, c’est peut-être dû à ma mutation.

La vieille femme hocha la tête.

- Très bien, n’oublie pas la réunion ce soir avec les Brahmanes.
- J’y serai, répondit Yulia, n’oublie pas qu’Anya en fait aussi partie.

Sur ces mots, Yulia finit rapidement son petit déjeuner, attrapa son manteau pendu devant la porte et se dirigea vers le couloir principal de leur toute petite demeure. Une porte s’y trouvait reliant leur lieu de vie à la boutique d’Irene Anatolievna, sa grand-mère ; elle la franchit et la claqua derrière elle. C’est à elle qu’incombait l’ouverture du magasin, sa grand-mère faisait la fermeture. Elle passa un rapide coup de balais à travers les maigres rayonnages, remit un peu d’ordre ici et là et ouvrit le store métallique qui dissimulait la vitrine. Pas un seul client ne se présenta ce matin là et à midi Yulia laissa la garde de la boutique à sa propriétaire et partie en direction du cabinet de son amie. Elle y arriva un quart d’heure plus tard et toqua discrètement  la porte de l’office. Rapidement le haut profil d’Anya remplaça la lourde porte et un petit sourire naquit sur les lèvres de la russe quand son amie lui adressa la parole :

- Yulia Alekseïevna, je suis vraiment contente de te revoir !
- Et moi donc Anya Nikitovna. Quel plaisir de te voir de nouveau à Polis.


Elle suivit son interlocutrice dans la chaleur de son petit bureau et ferma la porte derrière elle. Elle était vraiment ravie d’être ici après sa mauvaise nuit, Anya et elle s’était toujours très bien entendue et pour dire la vérité Yulia n’était pas très douée en relations sociales. Yulia s’assit sur la caisse qu’Anya lui présentait en la remerciant du regard.

- Bon sang je n’aurais pas cru que Polis me manquerait autant ! Bon je n’avais pas vraiment imaginé la quitter aussi longtemps en rejoignant les stations V.A.R.  Raconte-moi un peu tout ce qui s’est passé entre temps s’il te plait.
- Oh tu sais, tout change sans vraiment changer. Depuis que je suis chez les Brahmanes j’essaye un peu de calmer le jeu mais tu sais ce que c’est, l’homme a étrangement besoin de se trouver un ennemi et les tensions avec les militaires ne semblent pas s’améliorer. Enfin, je crois qu’on est quand même de plus en plus nombreux à en avoir plus qu’assez de cette petit gué-guerre insupportable. Le temps de se battre est révolu, il faut unir nos forces histoire de pas pourrir dans ce métro pour toujours.


Yulia saisit la tasse que son amie lui tendait et en bu une gorgée.

- Trève de bavardage, j’ai quelque chose pour toi oui ! Lors d’un troc, on m’a offert – ce qui est rare tu peux l’admettre, un exemplaire de « Précis de terminologie médicale » de J. Chevalier. Alors écoute, je ne sais pas ce que ça vaut mais je ne suis pas assez cultivée sur le sujet pour juger du coup je te le prête, tu peux le lire à ta guise, et si à la fin tu es vraiment convaincue je le mettrai peut-être en vente dans ma la boutique d’Irene.

Elle sortit le livre de son en cuir et le tendit à Anya. C’était un ouvrage bleu, broché, seul le titre apparaissait sur la couverture ainsi que le nom de l’auteur. Avant que son amie ne rentre dans la contemplation de l’ouvrage, Yulia l’interpella une nouvelle fois :

- J’ai quelque chose à te demander aussi. J’ai fait un rêve étrange cette nuit, je me demandais si il existait une possibilité pour que cela est un lien avec ma mutation ?
Anna Volkovar
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Lun 4 Déc - 10:19
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- Oh tu sais, tout change sans vraiment changer. Depuis que je suis chez les Brahmanes j’essaye un peu de calmer le jeu mais tu sais ce que c’est, l’homme a étrangement besoin de se trouver un ennemi et les tensions avec les militaires ne semblent pas s’améliorer. Enfin, je crois qu’on est quand même de plus en plus nombreux à en avoir plus qu’assez de cette petit gué-guerre insupportable. Le temps de se battre est révolu, il faut unir nos forces histoire de pas pourrir dans ce métro pour toujours.

La chirurgienne hocha doucement de la tête avec une moue pincée. Yulia exprimait avec justesse un avis qu’elles partageaient toutes deux. Pour l’heure, elle ne se sentait pourtant pas d’humeur de s’étendre sur le sujet. Quelques détails dans l’expression de son amie attiraient davantage son attention. Détournant son regard de son visage, elle le posa sur le livre que cette dernière lui tendait. Le sourire qui fleurit sur ses lèvres trahissait la convoitise qu’elle venait de faire naître. Elle s’était penchée légèrement en avant, se contenant de justesse pour ne pas prendre le livre des mains et commencer à le feuilleter. Les mains un peu crispées sur ses genoux, elle remonta le regard vers le visage de la jeune libraire et le détailla sans pudeur.

- J’ai quelque chose à te demander aussi. J’ai fait un rêve étrange cette nuit, je me demandais s’il existait une possibilité pour que cela est un lien avec ma mutation ?

Léger froncement de sourcil. Anna se redressa tout en continuant d’étudier l’expression de la jeune femme sans se soucier de la gêne que pouvait provoquer son attitude. Ainsi, il lui avait semblé que la libraire était venue entourée d’une aura soucieuse, quelque chose de bancal qu’elle traînait derrière elle sans qu’elle n’ait pu en déterminer la nature exacte. Penchant légèrement la tête de côté, Anna se surprit à avoir oublié tout l’attrait pour le livre que son amie tenait encore en main. Puis, au terme d’une seconde ou deux de silence, elle rompit son immobilité et prit en main la tasse de thé fumante avant de la porter à ses lèvres. Trouvant dans le geste quelque répit, elle réfléchissait aux confidences de la jeune libraire. Lorsqu’elle reposa la tasse, elle s’exprima d’une voix basse, un peu distante.

- Les connaissances concernant les mutations sont erratiques et incertaines. On sait simplement que certains développent des compétences exceptionnelles ou uniques et qu’elles sont rarement sans contrepartie. Je suis loin d’être experte dans ce domaine.

La jeune femme accompagna la déclaration d’un geste d’impuissance. Elle fronça une nouvelle fois les sourcils, incertaine.

- Raconte-moi s’il te plait.
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Lun 4 Déc - 21:35
- Les connaissances concernant les mutations sont erratiques et incertaines. On sait simplement que certains développent des compétences exceptionnelles ou uniques et qu’elles sont rarement sans contrepartie. Je suis loin d’être experte dans ce domaine.

Yulia s'attendait à une réponse dans ce style, Anya avait beau tout faire pour l'aider dans sa quête de réponses, les connaissances amassées sur la mutation restaient très vague.
Malgré son désappointement évident la jeune russe se sentait à l’aise en ce lieu, sa tasse de thé à la main, l’esprit réchauffé par la chaleur du petit cabinet. Ses yeux furetaient un peu partout, apprivoisant l’espace du regard mais son regard vif et curieux vint rapidement se reposer sur le visage de son interlocutrice : les sourcils froncés, le nez plissé, elle semblait être en pleine réflexion.

- Ne te bile pas Anya, je me doutais bien que ta réponse serait pas à l’image de ma question, peu aisée. Je voulais juste en discuter avec toi.

Yulia avait parlé d’une voix calme et posée, elle se permit même un petit sourire en direction de sa camarade, malgré la chape de plomb que sa déclaration avait entrainé, elle espérait que le livre plaisait à Anya. Les ouvrages historiques et scientifiques étaient les plus difficiles à trouver au contraire des romans en tout genre, pas toujours de très bonne qualité par ailleurs.
Au moment où Anya lui demanda de lui raconter son rêve Yulia se sentit happer par une force invisible et moult sensations envahirent son corps, elle ferma les yeux.

- Je pourrais te le résumer très brièvement en quelque mots : Je marche dans une forêt mais la réalité (si réalité il y a) est bien ailleurs.
Je n’ai jamais connu l’odeur de la terre humide après l’orage, je n’ai jamais connu la sensation d’une brise de vent caressant ma peau, je ne suis jamais allée à la Surface !


Elle avait presque crié.
Gênée, elle toussota pour masquer sa gène et avala prudemment une gorgée de thé désormais tiède.

- Excuse-moi, je me suis emportée. Tout ça pour dire que je l’ai ressenti cette nuit, c’est comme si j’y étais et j’avais l’impression de sentir la force dû à ma mutation palpiter en moi, j’avais envie de courir, d’attraper les branches, de m’y pendre à l’infini, c’était horrible et merveilleux.

Yulia frissonna une seconde au souvenir de ce rêve. Voulant se l'extraire de la mémoire elle agita la tête de gauche à droite puis se leva afin de se diriger vers la seule fenêtre du cabinet, assez grande pour l'illuminer. Le carreau était sale mais quand elle passa le doigt dessus, aucune particule de poussière ne s'envola : tout était similaire dans le métro, cette crasse molle qui recouvrait tout semblait appartenir à un autre âge.
Anna Volkovar
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Jeu 7 Déc - 15:41
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Une forêt.

De sa courte existence, Anna n’en avait aperçu qu’un souvenir. Entrailles rongées ouvertes au ciel miséricordieux, vestige d’un passé que tous avaient oublié. Elle se souvenait des silhouettes tortues qui s’élevaient vers le ciel, cherchant désespérément quelques rayons de lumière. Mais le soleil était mort. Moscou avait sombré. Pourtant loin de s’appesantir sur ces réminiscences peu glorieuses, la jeune femme n’avait pas quitté des yeux son amie. Cette dernière avait marqué une hésitation, fermé les yeux puis laissé les mots surgir en un flot continu, happée par les souvenirs de son rêve.

Cette dernière avait achevé son récit sur un cri d’impuissance et de frustration. La chirurgienne avait alors légèrement secoué la tête, les sourcils froncés. Parmi la population du métro, une poignée seulement pouvait se targuer d’être un jour montée en surface ; et d’y avoir survécu, bien entendu. Comme Yulia s’excusait, elle leva une main et avec un sourire lui intima d’en rester là. Si elle n’avait pas partagé son rêve, elle comprenait parfaitement ce qui avait pu la perturber tant. Et si Anna n’en parlait guère, elle même nourrissait parfois de tels songes. Non dans leur consistance et sans doute avec moins de réalisme mais, certainement guidée par ses lectures, il lui semblait pouvoir revoir la grandeur passée de l’ancien monde dans son sommeil.

- La surface, commença-t-elle.

Sa voix n’était qu’un murmure perdu dans un souffle. Elle porta la tasse à ses lèvres et en but une gorgée. Elle puisa un peu de réconfort dans le liquide brûlant qui réchauffait son palais.

- Ca n’a rien de beau ou de fantastique.

La jeune femme se tut, impuissante. Il lui semblait impossible de décrire la déception qui l’avait submergée la première fois qu’elle était montée en surface. S’il n’y avait pas eu la sensation de danger constante, elle se serait probablement laissée sombrer dans l’amertume ce jour-là.

- Il n’y a pas d’arbre. Pas de vie en dehors de créatures difformes et mortelles. Tout n’est que vestiges, ruines d’une ancienne cité et d’un âge dont, bientôt, seuls les livres pourront encore témoigner.

Et comme elle se sentait basculer lentement vers cette amertume qu’elle exécrait, elle se souvint des paroles qu’elle avait tenu un jour à son frère. Poussant un léger soupir, un sourire amer vint fleurir sur ses lèvres. Les yeux mi-clos, les mains serrées autour de la tasse fumante, elle secoua la tête.

- Je fais régulièrement un rêve aussi tu sais. Et chaque fois que je sors, je ne cesse de jeter un œil au ciel et j’espère qu’un jour l’immense nuage de cendre se fendra pour me laisser apercevoir un vrai rayon de soleil, éclatant. Je me lève dans l’espoir de voir le soleil comme il se levait autrefois. Avant tout ça.

Anna passa une main sur ses lèvres puis sa mâchoire, appuyant sur l’angle de celle-ci ; là où le masque anti-gaz exerçait le plus de pression. Chaque fois qu’elle levait les yeux vers le ciel mort, elle était tentée de retirer le masque et de le contempler. Etait-il aussi gris et terne sans les filtres des verres polarisés ? Suspendant son geste, Anna secoua la main. Les sourcils toujours froncés, elle semblait agacée par la nostalgie de ses propres paroles.

- Garde précieusement ce rêve, Yulia. Modèle-le, fais-en un havre vers lequel te réfugier quand le doute ou le désespoir t’accable. Un monde comme celui-ci a existé et, peut-être, en reverrons-nous un jour le reflet, elle inspira puis reprit d’une voix plus sûre, pour ce qui est de ta mutation, continue de t’entraîner. Essaie d’en quantifier les progrès. Après de tels rêves, tu pourrais peut-être aussi essayer de t’y exercer, voir si tu notes une différence ?

A présent, elle posait sur elle un regard amical dans lequel brillait la curiosité et l’empathie. L’amertume et la nostalgie qui l’avaient étreinte quelques secondes plus tôt s’était volatilisée au profit de cette éternelle soif de connaissance dont faisait preuve la chirurgienne. Rien n’avait véritablement changé, en fin de compte.
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Dim 17 Déc - 17:05
- La surface… Ça n’a rien de beau ou de fantastique. (…) Il n’y a pas d’arbre. Pas de vie en dehors de créatures difformes et mortelles. Tout n’est que vestiges, ruines d’une ancienne cité et d’un âge dont, bientôt, seuls les livres pourront encore témoigner.

Ce n’était pas la première fois que Yulia entendait ce genre de témoignage, elle connaissait quelques militaires de Polis qui avaient dû partir à l’extérieur pour des missions de reconnaissance et leurs histoires étaient toutes similaires. Des cendres à perte de vue, des petits tas de rien qui autrefois avaient formé un tout.
Elle avait lu un jour le carnet de bord d’un survivant de la guerre nucléaire, enfin il avait dû être tué par les radiations peu de temps après car son journal s’arrêtait sur ses mots : « Je pris une inspiration profonde, et aussitôt, une odeur pestilentielle de décomposition et de chair brûlée entra dans mon corps avec tant de force que j'eus l'impression qu'elle émanait de moi. C'était à vomir. J'avais l'impression, vivant, d'être mon propre cadavre. C'était une odeur âcre, pourrie, douceâtre, qui s'installait en moi et que j'aurais à porter jusqu'à la fin. Le monde n'était plus qu'une fosse commune, et moi, on m'avait laissé seul sur ce charnier, avec mes compagnons, pour enterrer les morts et vivre avec leur odeur. »
Elle se rappelait de l'horreur qu'elle avait ressenti en lisant ces quelques mots, elle qui voyait l'extérieur comme une porte de secours, elle le voyait désormais comme un immense cimetière.
Yulia revint s’asseoir en face de son amie puis étira son bras de manière à attraper la théière posée entre elles afin de se servir à nouveau. Après un bref coup d’œil interrogatif en direction d’Anna, elle reposa l’ustensile, la jeune femme venait de lui indiquer qu’elle n’avait pas encore terminé sa tasse.
Elle ne savait que répondre aux paroles de son interlocutrice, le simple fait de s’imaginer cette réalité lui remontait le cœur au bord des lèvres. Elle avala rapidement une gorgée de thé pour dissimuler l’amertume qui se répandait dangereusement sur sa langue. Le visage de sa camarade était crispé et elle sentait qu’Anna avait dû faire face à de nombreuses déceptions en se retrouvant à la surface.

- Je fais régulièrement un rêve aussi tu sais. Et chaque fois que je sors, je ne cesse de jeter un œil au ciel et j’espère qu’un jour l’immense nuage de cendre se fendra pour me laisser apercevoir un vrai rayon de soleil, éclatant. Je me lève dans l’espoir de voir le soleil comme il se levait autrefois. Avant tout ça.

Yulia hocha la tête doucement et par réflexe, sa main vint se poser sur le bras d'Anna, qu'elle serra prestement.

- Un jour tu le verras Anna, un jour il reviendra. J’ai beaucoup lu sur les conséquences du nucléaire et ce brouillard nauséabond en fait partie mais j’ai aussi beaucoup lu sur la Terre en elle-même et la Nature l’emporte toujours, un jour le soleil percera et tu seras là dehors, tu ne l’attendras peut-être même pas ce jour-là et il viendra te réchauffer la peau. Ce jour-là tu penseras à moi et à ma forêt.

Yulia n’était pas une rêveuse éperdue et naïve, bien au contraire, elle ne se laissait que très rarement guidée par l’espoir vain et les rêves futiles mais la science parlait en elle. Elle savait que tout n’était pas irréversible.

- Garde précieusement ce rêve, Yulia. Modèle-le, fais-en un havre vers lequel te réfugier quand le doute ou le désespoir t’accable. Un monde comme celui-ci a existé et, peut-être, en reverrons-nous un jour le reflet (…) Pour ce qui est de ta mutation, continue de t’entraîner. Essaie d’en quantifier les progrès. Après de tels rêves, tu pourrais peut-être aussi essayer de t’y exercer, voir si tu notes une différence ?

- Justement, lui répondit Yulia, après avoir fait ce rêve je n’avais qu’une envie, courir le plus vite et le plus longtemps possible, j’avais l’impression de « sentir » ma mutation palpitait en moi pour la première fois de ma vie, comme si elle m’ordonnait de l’utiliser, comme si elle souffrait elle aussi d’être restreinte aux couloirs du métro.
Anna Volkovar
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Lun 18 Déc - 17:52
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Lorsque la libraire avait posé une main sur son bras, la jeune femme avait frémi. Sans se dérober pour autant, elle accueillit les paroles de son amie avec un sourire. Elle appréciait ses intentions et y trouvait une forme de réconfort. Hochant à son tour la tête, les yeux mi-clos, elle apprécia la quiétude qui émanait alors de cet instant. L’espace de quelque seconde, il lui semblait oublier une part des inquiétudes qui formaient son quotidien. Sa fatigue s’était même allégée et elle se surprit à sourire, vraiment, simplement. Elle inspira longuement puis porta la tasse à ses lèvres de son bras libre. Comme Yulia reprenait la parole, elle avait retiré sa main et semblait s’animer de nouveau. Fascinée par la véhémence de la jeune femme, Anya ne la quittait par du regard. Les yeux plissés, elle feignait une somnolence sereine, enregistrant les moindres détails qui composaient le visage de la libraire.

- Je vois, laissa-t-elle filer à mi-voix.

Elle avait ensuite acquiescé de la tête. Le dos appuyé contre le mur, elle remonta ses jambes contre elle puis les entoura de ses bras, la tasse maintenue entre ses deux mains jointes. La chirurgienne avait beau présenter un esprit pragmatique, elle n'écartait pas la puissance du subconscient et des rêves. Elle avait assisté plus d'une fois aux miracles qu'ils pouvaient accomplir là où la science se révélait muette.

- Si tu refais ce rêve, il serait intéressant justement de partir sur une petite séance d’entraînement. Essaie de faire un parcours ou des efforts dont tu as l’habitude pour comparer un peu tes performances. Il faudrait aussi mesurer la récupération qui suit. Peut-être que le fait de t’entraîner plus régulièrement ou, au contraire, de ne pas le faire peut influer sur tes rêves, leur fréquence et leur réalisme.

Pendant sa tirade, elle avait plissé les yeux, le regard légèrement tourné vers l’intérieur. Elle laissait filer ses pensées, tentant d’imaginer toutes les alternatives possibles. Depuis qu’elle était enfant, Anya avait toujours été fascinée par les énigmes. Les mutations et les capacités surnaturelles qu’avaient développé les survivants du métro constituait à ses yeux la plus grande et la plus fascinante des énigmes. Elle-même, si elle ne l’avouait pas vraiment, était un peu envieuse de tous ces cas qu’elle étudiait lorsqu’elle en avait l’occasion. Elle aurait aimé pouvoir constituer un sujet d’étude.

- Si tu tiens un journal du bord, tu pourrais aussi y coucher tes rêves, leur teneur et les sensations qui les accompagne. Ça te permettrait de mesurer leur fréquence et voir s’ils évoluent ou gagnent en précision.

Elle soupira, abandonnant une partie de son air professoral pour arborer un sourire cynique.

- C’est aussi une façon de ne pas perdre de vue ses rêves…
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Jeu 21 Déc - 11:18
Yulia n'était pas de ceux qui collectionnent les amis comme les paires de chaussures, même si en ces temps difficiles il était difficile de collectionner quoi que ce soit. Durant son enfance, elle avait traîné avec les va-nu-pieds de Polis qui l'accompagnaient lors de ses nombreuses explorations nocturnes mais en grandissant elle s'était éloignée de ses anciens camarades qui se destinaient à une vie de maraude et d'escroquerie. Elle s'était rapidement plongée dans la douce solitude de ceux qui ont choisi les livres comme compagnons de vie et mis à part sa grand-mère, elle n'entretenait au jour d'aujourd'hui aucune relation sociale. Anna échappait bienheureusement à cette règle.
Elle avait rencontré la jeune femme à son entrée chez les Brahmanes et mues par des passions communes, les deux Poliséennes c'étaient rapidement bien entendu. Malgré l'obscurantisme dans lequel vivait Yulia, sa rencontre avec Anna avait fait basculé le désintérêt notoire que Yulia éprouvait pour sa propre vie quand cette dernière avoua sa curiosité vis à vis de sa mutation. Dans les yeux de la russe Yulia se voyait différente, certes,  mais surtout spéciale et valorisée, c'était la première fois de sa vie qu'elle ressentait des émotions de ce type, ce n'était pas forcément pour lui déplaire.

- Si tu refais ce rêve, il serait intéressant justement de partir sur une petite séance d’entraînement. Essaie de faire un parcours ou des efforts dont tu as l’habitude pour comparer un peu tes performances. Il faudrait aussi mesurer la récupération qui suit. Peut-être que le fait de t’entraîner plus régulièrement ou, au contraire, de ne pas le faire peut influer sur tes rêves, leur fréquence et leur réalisme.

Yulia écoutait avec attention les paroles de son amie. Depuis le début, les recherches qu'elles menaient conjointement sur la mutation n'avaient pas donné grand chose mais Yulia espérait qu'un jour leurs efforts paieraient.
La récupération. Un grand problème pour Yulia qui souffrait quotidiennement de vives douleurs musculaires qui ne la quittaient presque jamais. Pourtant aujourd'hui, ses muscles semblaient moins tendus que d'habitude et la douleur semblait s'être un peu estompée. A ne pas s'y tromper, c'était presque un miracle et une bénédiction pour la jeune femme. Même si elle s'y était habituée, vivre avec une douleur permanente n'était pas chose aisée pour la jeune russe.

- J'ai un peu moins mal aujourd'hui. Tu crois que le rêve pourrait y être pour quelque chose ? J'étais si bien dans ce rêve...

Peut-être n'en était-elle pas encore totalement sortie ?
Tout en pensant cela, elle observait son amie sans discrétion aucune. Une grande et belle femme, imposante, déstructurée. Son visage aquilin semblait presque taillé au couteau, à même le marbre. Un front haut, des pommettes saillantes, des yeux brillants, elle était d'une grande beauté, un peu féroce, un peu sauvage ; de grandes cernes lui mangeaient le visage.

- Si tu tiens un journal du bord, tu pourrais aussi y coucher tes rêves, leur teneur et les sensations qui les accompagne. Ça te permettrait de mesurer leur fréquence et voir s’ils évoluent ou gagnent en précision. (…) C’est aussi une façon de ne pas perdre de vue ses rêves…


Tout en buvant une gorgée de thé qui cette fois ci lui brûla le bout de la langue, Yulia hocha la tête tout en réfléchissant, cette idée lui avait bien sur traversé l'esprit mais elle était satisfaite de voir que son amie était arrivée à la même conclusion, cela la confortait dans son raisonnement.

- Tu as raison. J'ai vraiment l'impression que ce rêve n'était pas comme les autres, il me semblait plus...réel.
De toute manière, tu seras la première informée si il se passe quelque chose de nouveau, soit en assurée, Anna Nikitovna.
Anna Volkovar
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Double-compte : Nina
Anna Volkovar
Médecin-chirurgien
Mar 26 Déc - 16:50
Médecin-chirurgien

Passeport
Age :: 28 ans
Patronyme :: Nikitovna
Surnom :: Anya
Anna n’avait pu s’empêcher de grimacer. Elle connaissait les douleurs de son amie, récurrentes, omniprésentes. Elle avait été tentée pendant un temps de lui proposer des remèdes qu’elle utilisait auprès de certains patients pour calmer certains maux. Pour en avoir usé par moment, elle savait cependant que de tels remèdes n’allaient pas sans effet secondaire. Elle préférait encore garder l’esprit clair, aiguillé par la douleur si nécessaire plutôt que de sombrer dans une lente léthargie où l’on perdait progressivement le contrôle de la situation.

- Pour ces douleurs…il existe des décoctions à base de champignons qui pourraient les calmer.

Les sourcils froncés, le regard perdu devant ses pieds, elle serrait la tasse entre ses mains. Cette dernière était presque vide. La jeune femme releva le regard et croisa celui de son ami.

- Mais j’ai peur que ça ait un effet sur ta mutation : la rendre passive ou, au contraire, éveiller d’autres contreparties. Dans tous les cas j’en ai ramené de mon excursion à la V.A.R si tu veux essayer.

Elle tourna la tête vers un sac qu’elle n’avait pas encore prit la peine de déballer. Ce dernier contenait essentiellement ses trouvailles et ses achats. Coincée pendant plusieurs semaines aussi loin de sa faction d’origine, elle avait profité des moindres temps libres pour marchander et négocier du matériel et des vivres intéressants. A ce propos, elle songea à une lecture qui ne l’avait pas laissée indifférente, une petite trouvaille de la station VDKNh. Malheureusement, elle avait dû la revendre et s’en séparer avant de reprendre le chemin de Polis pour ne pas voyager trop chargée.

- J’ai lu quelque chose à propos de méthode d’auto-hypnose et de méditation. Cela permettait justement de soulager certains mots physiques mais aussi de partir à la recherche de certains rêves. C’était un traité à propos d’une civilisation de l’Est.

Elle porta la tasse à ses lèvres et la finit d’un trait, ignorant la chaleur qui envahissait son palais puis son œsophage. La jeune femme reposa ensuite la tasse avec un bruit mat.

- Je me souviens encore du titre et de l’auteur. Je me demande si on ne pourrait pas en trouver un exemplaire dans nos archives ou au-dessus…

Elle avait soufflé les derniers mots, presqu’un murmure. Anna ne voyait rien de mystique dans l’évocation de la quantité de savoir qui siégeait au-dessus de leur tête, inaccessible mais elle avait pris l’habitude, à l’instar de ses pairs, d’en parler avec précaution. Elle reporta son regard vers la jeune femme et l’interrogea d’un haussement de sourcil.
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